La procédure devant le conseil de prud’hommes (+ modèle de requête CPH)

Présentation du CPH

Le conseil de prud’hommes (CPH) :

  • est une juridiction d’exception composée, à parité, de conseillers prud’hommes désignés en fonction de l’audience des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d’employeurs (C. trav., art. L. 1421-1 et L. 1441-1) :
  • comprend plusieurs formations :
    • le bureau de conciliation et d’orientation (BCO),
    • le bureau de jugement (BJ),
    • la formation des référés ;
  • comprend cinq sections autonomes, chacune composée d’au moins 3 conseillers prud’hommes employeurs, et de 3 conseillers prud’hommes salariés (C. trav., art. R. 1423-1) :
    • la section de l’encadrement,
    • la section de l’industrie,
    • la section du commerce et des services commerciaux,
    • la section de l’agriculture,
  • comporte, en plus, une formation commune de référé (C. trav., art. L. 1423-1, al. 2, et art. R. 1455-1) ;
  • connaît des différends individuels opposant un employeur – ou son représentant – à l’un de ses salariés, en lien avec le contrat de travail régi par le Code du travail qui les unit (C. trav., art. L. 1411-1).

La procédure devant le CPH

La procédure prud’homale :

  • est orale (C. trav., art. R. 1453-3) et sans représentation obligatoire en première instance (C. trav., art. R. 1453-1) ;
  • avec représentation obligatoire en appel, pour les instances et les appels introduits depuis le 1er aout 2016 (C. trav., art. R. 1461-1, al. 2) ;
  • comprend, en principe, deux « phases » distinctes :
    • une audience préalable de conciliation se déroulant devant le BCO du CPH compétent,
    • puis, une audience tenue devant la formation appropriée du BJ institué auprès du même conseil pour les points restant en conflit.

Les décisions prud’homales sont rendues en premier et dernier ressort lorsque la valeur totale des prétentions d’aucune des parties ne dépasse 5 000 € (C. trav., art. R. 1462-1, et art. D. 1462-3).

Faire attention à :

Compétence matérielle du CPH

Le CPH est saisi de tous les litiges individuels :

– opposant un salarié à son employeur ;

– et nés du contrat de travail de droit privé qui les unit.

Le bureau de jugement (BJ) peut parfois être directement saisi d’un différend.

Il en va ainsi notamment :

Attention : Dans ces cas, le BJ doit statuer au fond, dans le délai d’un mois suivant sa saisine (C. trav., art. L. 1245-2, al. 1er, art. L. 1451-1, in fine).

Le CPH dispose d’une compétence exclusive.

Toute convention dérogeant à cette compétence est réputée non écrite (C. trav., art. L. 1411-4, al. 1er).

Le CPH connaît, en principe (C. trav., art. L. 1411-1, et L. 1411-2) des litiges individuels

et qui sont liés :

Le CPH statue également sur :

  • un litige né entre salariés à l’occasion du travail (C. trav., art. L. 1411-3) ;
  • un litige impliquant le personnel des services publics lorsqu’il est employé dans les conditions de droit privé (C. trav., art. L. 1411-2) ;
  • les différends nés d’un contrat de travail entre les concierges ou employés d’immeubles à usage d’habitation et leurs employeurs, ou des contrats qui en sont l’accessoire (C. trav., art. L. 7215-1) ;
  • le litige né du contrat de production, opposant un artiste à son producteur (C. trav., art. L. 7121-3).

Attention : Le CPH est incompétent lorsque le litige concerne notamment (C. trav., art. L. 1411– 1 et art. L. 1411-4, al. 2) :

Compétence territoriale du CPH

Toute clause du contrat de travail attributive de compétence territoriale est réputée non écrite (C. trav., art. R. 1412-4).

Principes

Travail effectué dans un établissement : compétence du CPH dans le ressort duquel cet établissement est situé (C. trav., art. R. 1412-1, 1).

Travail accompli en dehors de tout établissement, ou travail à domicile : compétence du CPH dans le ressort duquel le domicile du salarié se situe (C. trav., art. R. 1412-1, 2°).

Option offerte au salarié

Le salariéet lui seul – peut, dans tous les cas, saisir le CPH (C. trav., art. R. 1412-1) :

  • dans le ressort duquel l’engagement a été contracté ;
  • dans le ressort duquel l’employeur est établi.

Saisine d’un CPH situé dans un ressort limitrophe

Le demandeur peut saisir le CPH de son choix, situé dans un ressort limitrophe (CA Metz, 31 janv. 2018, n° 17/013119 : JurisData n° 2018-001336), lorsqu’un conseiller prud’homme est partie à un litige qui relève de la compétence de la juridiction dans le ressort de laquelle il exerce ses fonctions (CPC, art. 47, al. 1er. – CA Rouen, 7 avril 2022, n° 19/03025 : JurisData n° 2022-005639).

Comment saisir le conseil de prud’hommes : requête ou assignation ?

Selon le premier alinéa de l’article R. 1452-1 nouveau du Code du travail, devant le conseil de prud’hommes « la demande en justice est formée soit par une requête, soit par la présentation volontaire des parties devant le bureau de conciliation et d’orientation » ; on écartera ici l’hypothèse de présentation volontaire.

Le CPH est saisi par :

Copie de l’assignation est remise au greffe, au plus tard la veille de l’audience (C. trav., art. R. 1455-9, al. 2).

L’assignation n’a pas indiquer « les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée » (C. trav., art. R. 1455-9, al. 2).

Attention : Le demandeur doit communiquer ses pièces au défendeur rapidement – en tous les cas, dans les délais impartis par le BCO (C. trav., art. R. 1454-1, al. 2, art. R. 1452-3, al. 2 et art. R. 1454-2.

Pour cela, l’envoi des pièces au défendeur par acte du commissaire de justice ou, à tout le moins, par pli recommandé est recommandé.

Mentions obligatoires

Les formes de la requête sont décrites à l’article R. 1452-2 :

• Les mentions obligatoires peuvent être extraites du deuxième alinéa : à peine de nullité la requête doit comporter les mentions prescrites à l’article 58 du Code de procédure civile, applicables en principe à toute requête en matière contentieuse ; on sait qu’il s’agit essentiellement de l’identification des parties et de l’objet de la demande, ainsi que de la date et de la signature du requérant (ou de son représentant) ; une difficulté naît de l’avant-dernier alinéa de l’article 58 qui oblige en principe à mentionner « les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige », nous y reviendrons. La principale nouveauté réside dans l’obligation de faire un exposé sommaire des motifs de la demande et de mentionner chacun des chefs de celle-ci.

• La requête est accompagnée des pièces du demandeur et il y est annexé un bordereau qui les énumère. Requête et bordereau doivent être établis en autant d’exemplaires que de défendeurs plus un pour la juridiction.

• Elle « est faite, remise ou adressée au greffe du conseil de prud’hommes », donc elle prend finalement la forme d’un écrit, même s’il s’agit en fait de la consignation par le greffe de ce qui est en réalité une déclaration du demandeur.

En pratique on trouve dans certaines formules le consentement du demandeur à l’utilisation du courrier électronique ou des SMS, pour les avis du greffe transmis dans l’instance en cours, dans les conditions prévues à l’article 748-8 du Code de procédure civile ; ce n’est en aucun cas une mention obligatoire de la requête.

Pourquoi le formulaire CERFA n’est pas adapté ?

 Assurément l’obligation de faire dans la requête un exposé sommaire des motifs de la demande et de mentionner chacun des chefs de celle-ci donnera lieu à discussion. Les formulaires CERFA proposent une nomenclature avec des cases à cocher, ce qui a le mérite de simplifier le travail de la juridiction, mais il n’est pas possible d’en déduire l’irrecevabilité de demandes ultérieures en première instance étant donné le caractère oral de la procédure prud’homale maintenu en principe.

Pour la même raison, l’exposé sommaire des motifs n’a que valeur d’information et ne saurait interdire des moyens nouveaux en cours d’instance ; les formulaires CERFA réservent à cet effet 10 lignes de texte. On conçoit mal que le salarié non représenté qui « fait » sa requête au greffe soit tenu de motiver juridiquement ses prétentions ; à l’inverse on constate que certains avocats choisissent d’exposer d’emblée l’intégralité de leur argumentation dans des manières de conclusions ; libre à eux mais il n’y a pas d’obligation sur ce point.

Mise en état

La mise en état des affaires est assurée par :

  • le BCO

ou

Le BCO fixe le délai de communication des pièces ou des notes que les parties souhaitent produire à l’appui de leurs prétentions (C. trav., art. R. 1454-1, al. 2. – Rappr.C. trav., art. R. 1454-19, pour la mise en état assurée par le BJ).

Attention : Ni le Code du travail, ni le Code de procédure civile n’autorisent le BCO à ordonner, sous astreinte, à l’une des parties de produire aux débats, dans le délai imparti, les pièces qu’il détermine (CA Chambéry, 27 août 2019, n° 19/00358 : JurisData n° 2019-018285).

Le BCO et le BJ peuvent désigner un ou deux conseillers rapporteurs C. trav., art. L. 1454-1-2, al. 3, art. R. 1454-3 et art. R. 1454-19-1).

Le(s) conseiller(s) rapporteur(s) dispose(nt) d’un délai, déterminé dans la décision qui le(s) désigne, pour réunir tous les éléments d’information nécessaires au conseil de prud’hommes pour statuer (C. trav., art. R. 1454-3, al. 2).

Attention : La décision désignant le(s) conseiller(s) rapporteur(s) n’est pas susceptible de recours.

Les décisions du conseiller rapporteur :

  • sont provisoires ;
  • n’ont pas autorité de chose jugée au principal ;
  • sont exécutoires ;
  • ne peuvent, en principe, faire l’objet d’un recours qu’avec le jugement sur le fond (C. trav., art. R. 1454-6).

Le BCO, les conseillers rapporteurs qu’il a désignés, ou le BJ peuvent fixer par ordonnance la clôture de l’instruction.

Copie de cette ordonnance est remise aux parties ou à leur conseil (C. trav., art. L. 1454-1-2. – C. trav., art. R. 1454-19-3 et R. 1454-19-4).

La décision

Caractères de la décision

Certaines décisions prud’homales sont exécutoires par provision (V. C. trav., art. R. 1454-16).

Tel est le cas des mesures ordonnées par le BCO (C. trav., art. R. 1454-14 et R. 1454-15) tendant notamment à :

  • la délivrance, le cas échéant, sous peine d’astreinte, de certificats de travail, de bulletins de paie et de toute pièce que l’employeur est légalement tenu de délivrer ;
  • au versement, lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, de provisions sur les salaires, les accessoires du salaire (V. 3.7.2).

 Notification

Le greffe du CPH notifie les décisions prud’homales aux parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au lieu de leur domicile effectif (C. trav., art. R. 1454-26, al. 1er).

Remarque : Vérifier que l’acte de notification indique, de façon très apparente, le délai et les modalités du recours (CPC, art. 680).

Sinon, le délai de recours ne court pas (Cass. soc., 29 mai 2013, n° 12-13.357 : JurisData n° 2013-010748).

Les parties :

  • sont informées par tous moyens des mesures d’administration judiciaire ;
  • peuvent également faire signifier la décision par acte de commissaire de justice (C. trav., art. R. 1454-26).

Contestation

Appel

Opposition

Modèle de requête

Voici un squelette d’une requête au conseil de prud’hommes adressée, par précaution par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, par l’avocat du demandeur.

Recommandé avec demande d’avis de réception

Requête aux fins de saisine du conseil de prud’hommes de…… (siège)

Demandeur

CHOISIR selon le cas

1. – Demandeur personne physique

…… (nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance)

2. – Demandeur personne morale

…… (forme, dénomination, siège social et organe de représentation légal)

POURSUIVRE ensuite

représenté(e) par…… (identification de l’avocat dans l’hypothèse ici retenue, étant rappelé que la représentation n’est pas obligatoire en première instance)

Défendeur(s)

(répéter autant que nécessaire)

CHOISIR selon le cas

1. – Défendeur personne physique

…… (nom, prénoms et domicile)

2. – Défendeur personne morale

…… (dénomination et siège social)

POURSUIVRE ensuite

RAISONS DE LA DEMANDE

…… (exposé des faits)

AJOUTER éventuellement

…… (diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige)

POURSUIVRE ensuite

…… (exposé des motifs de la demande qui peut n’être que sommaire)

OBJET DE LA DEMANDE

C’est pourquoi…… (demandeur) demande au conseil : …… (répéter autant que nécessaire).

…… (chef de demande)

POURSUIVRE ensuite

…… (date)

…… (signature de l’avocat)

Bordereau des pièces

(énumération des pièces que le demandeur souhaite invoquer à l’appui de ses prétentions)

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