Quelles sont les étapes du partage judiciaire d’une succession ou indivision ?

Vous êtes héritier d’une succession et vous souhaitez sortir de l’indivision, c’est-à-dire recevoir votre part d’héritage et en devenir propriétaire individuellement. Mais vous rencontrez des difficultés pour parvenir à un accord avec les autres héritiers, ou l’un d’entre eux est absent ou défaillant. Dans ce cas, vous pouvez recourir au partage judiciaire, une procédure qui permet au juge de trancher le litige et de prononcer le partage.

Quelles sont les étapes à suivre pour cette solution ultime ?

Nous vous expliquons tout dans cet article.

Phase extra-judiciaire : mise en demeure à la partie adverse (fond)

Avant de saisir le tribunal judiciaire, il est recommandé de mettre en demeure la partie adverse de procéder au partage amiable de la succession. Il s’agit d’un courrier recommandé avec accusé de réception, par lequel vous exprimez votre volonté de sortir de l’indivision et vous proposez une répartition des biens. Vous pouvez également y joindre un projet de partage établi par un notaire ou un avocat.

La mise en demeure a plusieurs intérêts :

  • elle permet de tenter une dernière fois de trouver un accord avec la partie adverse ;
  • elle permet de prouver que vous avez accompli les diligences nécessaires en vue du partage amiable ;
  • elle est nécessaire avant d’engager l’action judiciaire

La mise en demeure n’interrompt pas le délai de prescription.

Si la mise en demeure reste sans réponse ou si la partie adverse refuse le partage amiable, vous pouvez alors saisir le tribunal judiciaire.

Assignation en partage judiciaire devant le tribunal judiciaire

La deuxième étape du partage judiciaire consiste à saisir le tribunal judiciaire compétent pour régler la succession. Il s’agit du tribunal du lieu d’ouverture de la succession, c’est-à-dire du dernier domicile du défunt. Le tribunal est saisi par une assignation en partage, qui est un acte de procédure par lequel un héritier (le demandeur) convoque les autres héritiers (les défendeurs) devant le juge. Il est également possible de saisir le tribunal par une requête collective, qui est un acte commun à tous les héritiers qui souhaitent le partage judiciaire.

L’assignation en partage doit respecter un certain formalisme, sous peine d’être rejetée par le juge. Elle doit notamment contenir³ :

  • un descriptif sommaire du patrimoine du défunt, c’est-à-dire la liste des biens à partager et leur valeur estimée ;
  • les intentions du demandeur quant à la répartition des biens, c’est-à-dire la manière dont il souhaite que le partage soit effectué ;
  • les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable, c’est-à-dire les démarches effectuées pour tenter de résoudre le conflit sans passer par le juge.

L’assignation en partage doit être signifiée aux autres héritiers par un huissier de justice, qui leur remet une copie de l’acte.

Première audience d’orientation virtuelle

La troisième étape du partage judiciaire consiste à participer à la première audience devant le juge, appelée aussi audience d’orientation. Cette audience est virtuelle.

Le juge établit un calendrier de procédure ou fixe une date pour la prochaine audience de mise en état.

Aucun jugement n’est rendu à la première audience qui est une simple audience d’enregistrement de l’affaire.

Audiences de mise en état et échanges des écritures entre les parties

La quatrième étape du partage judiciaire consiste à échanger des écritures entre les parties, selon le calendrier fixé par le juge. Les écritures sont des documents rédigés par les avocats des parties, qui exposent les faits, les arguments et les demandes de leurs clients. Il existe différents types d’écritures :

  • les conclusions au fond, qui sont les premières écritures déposées par le demandeur ;
  • les conclusions en réponse, qui sont les premières écritures déposées par le défendeur ;
  • les conclusions en réplique, qui sont les secondes écritures déposées par le demandeur ;
  • les conclusions en duplique, qui sont les secondes écritures déposées par le défendeur.

Les écritures doivent être communiquées au juge et aux autres parties dans les délais impartis. Elles doivent également être accompagnées des pièces justificatives.

Audience d’incident (optionnel)

Il s’agit d’une audience qui intervient en cours de procédure, pour trancher une question particulière ou un différend entre les parties. Par exemple, il peut s’agir :

  • d’une demande de sursis à statuer, qui vise à suspendre la procédure en attendant la résolution d’une autre affaire ;
  • d’une demande de jonction ou de disjonction d’instances, qui vise à réunir ou à séparer plusieurs procédures liées entre elles ;
  • d’une demande de communication de pièces, qui vise à obtenir la production de documents par l’autre partie ;
  • d’une demande de mesures provisoires, qui vise à obtenir une décision urgente du juge sur un point précis.

L’audience d’incident peut être fixée par le juge ou sollicitée par l’une des parties. Elle donne lieu à des échanges d’écritures entre les parties et à une plaidoirie devant le juge. Le juge rend ensuite une ordonnance qui tranche l’incident.

Audience au fond du tribunal

A cette occasion, le tribunal :

  • Statue sur la demande de partage judiciaire
  • Tranche certains points de droit
  • Nomme un notaire commis ou un notaire liquidateur
  • Nomme un expert

C’est à la suite de l’audience au fond qui ordonne le partage de la succession que tout commence réellement.

Jugement de partage : ouverture des opérations devant le juge commis et notaire commis

À la suite de l’audience au fond, le juge rend un jugement au fond par lequel il prononce le partage à la suite d’une demande d’ouverture des opérations de liquidation et partage (à différencier de la désignation judiciaire d’un notaire en vue de poursuivre les opérations de liquidation et partage à titre de mesure conservatoire).

Deux possibilités :

  • Opérations simples : Dans ce cas, le partage est prononcé en renvoyant éventuellement les
    parties devant un notaire chargé d’établir l’acte et accomplir les mesures de publicité.
  • Opérations complexes : Dans ce cas, le juge désigne, en plus du notaire, un juge commis chargé de veiller au bon déroulement des opérations de partage et de dresser un “projet d’état liquidatif“. Le tribunal peut également ordonner avant dire droit une expertise en désignant un expert judiciaire pour chiffrer et établir les comptes entre les parties.

Il s’agit de l’opération la plus longue qui va concentrer 80 % du temps du partage judiciaire.

Renvoi devant le notaire commis pour le procès-verbal d’ouverture des opérations de partage de la succession

Se rendre devant le notaire commis, si le juge l’a désigné dans son jugement.

Le notaire commis est un notaire chargé de procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage de la succession, sous le contrôle du juge.

Le notaire désigné convoque l’ensemble des héritiers.

Il établit alors un acte appelé «procès verbal d’ouverture des opérations de partage de la succession».

Il dispose d’un délai d’un an suivant sa désignation pour dresser un état liquidatif. Attention : ce délai peut être suspendu pour plusieurs raisons (désignation d’un expert, adjudication…).

Il a pour mission :

  • d’établir l’inventaire des biens de la succession, s’il n’a pas été fait auparavant ;
  • d’évaluer les biens de la succession, en tenant compte des éventuelles contestations des parties ;
  • de calculer les droits de chaque héritier dans la succession, en tenant compte des donations antérieures et des rapports successoraux ;
  • de proposer un projet de partage des biens entre les héritiers, en respectant les règles légales et le jugement du juge ;
  • de soumettre le projet de partage aux héritiers, qui disposent d’un délai pour faire connaître leur acceptation ou leur refus ;
  • de rédiger un procès-verbal d’opérations, qui constate les résultats des opérations et fixe les modalités de paiement
  • de rédiger un acte de partage, qui constate la répartition des biens entre les héritiers et met fin à l’indivision.

Rapport d’étape

Ce n’est pas obligatoire, mais le juge commis peut demander au notaire commis de lui adresser un rapport d’étape pour suivre l’avancée de son travail.

Projet d’état liquidatif

Le Notaire commis adresse aux parties un projet d’état liquidatif.

Convocation chez le notaire

A la suite de la communication du projet d’état liquidatif, le Notaire convoque l’ensemble des parties pour signer le projet.

Procès-verbal de difficultés (aussi appelé “procès-verbal de dires”) ou partage définitif

🫱🏻‍🫲🏻En cas d’accord : le notaire établit le partage définitif. C’est fini !

❌En cas de désaccord : le notaire constate le désaccord dans un « procès-verbal de difficultés » aussi appelé “procès-verbal de dires”. Celui-ci contient le projet d’acte de partage et la constatation du désaccord. L’acte doit aussi relater les remarques éventuelles des héritiers. Le notaire commis établit un procès-verbal reprenant les dires respectifs des parties qu’il adresse au juge commis.

Audience devant le juge commis

Le juge commis tient une audience au cours de laquelle il va examiner le procès-verbal de dire établi par le Notaire.

Rapport du juge commis sur les points de désaccord subsistants

Renvoi devant le tribunal judiciaire au fond à l’issue des opérations d’expertise

Les parties sont ensuite renvoyées devant le tribunal judiciaire au fond, si le notaire commis n’a pas réussi à faire accepter son projet de partage par les héritiers.

Échanges d’écritures entre les parties

Audience de plaidoiries au fond

La dernière étape du partage judiciaire consiste à participer à l’audience de plaidoiries, qui est la dernière audience avant le jugement.

L’audience de plaidoiries se termine par la mise en délibéré de l’affaire, c’est-à-dire le temps que le juge prend pour réfléchir et rédiger sa décision.

Mise en délibéré de l’affaire

Jugement du tribunal judiciaire au fond

Renvoi devant le notaire commis pour exécution du jugement du juge

Lorsque le juge estime que le notaire commis n’est pas assez diligent, il peut ordonner un partage, notamment de biens immobiliers, dans son jugement sans renvoi devant le notaire commis. Le Juge rendra alors une décision très détaillée, visant chacune des références cadastrales des biens à partager. Fort de ce jugement, l’héritier pourra directement se rendre au SPF pour publication.

Sans préjudice d’un appel possible sur chaque décision (jugement au fond et ordonnance) du juge de première instance

Conclusion

Le partage judiciaire d’une succession est une procédure complexe et longue, qui implique plusieurs étapes et plusieurs intervenants. Il comporte également des frais importants, notamment les frais d’avocat, de notaire, d’huissier et de justice

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