Que faire après un classement sans suite de ma plainte ?

Vous avez déposé une plainte pour une infraction dont vous avez été victime, mais le procureur de la République a décidé de ne pas engager de poursuites contre l’auteur des faits. On parle alors de classement sans suite.

Quels sont les motifs possibles d’un classement sans suite ?

Quels sont les recours dont vous disposez pour contester cette décision et obtenir réparation de votre préjudice ?

Et surtout, comment ne pas perdre espoir et se sentir reconnu dans son statut de victime ?

Voici les réponses à vos questions.

Qu’est-ce qu’un classement sans suite ?

Un classement sans suite est une décision du procureur de la République de ne pas engager de poursuites pénales contre l’auteur présumé d’une infraction, c’est-à-dire de ne pas donner suite, malgré l’existence d’une plainte.

Ce pouvoir de poursuivre ou de classer est appelé : opportunité des poursuites.

Le classement sans suite est prévu par l’article 40-1 du code de procédure pénale, qui dispose :

« Lorsqu’il estime que les faits qui ont été portés à sa connaissance en application des dispositions de l’article 40 constituent une infraction commise par une personne dont l’identité et le domicile sont connus et pour laquelle aucune disposition légale ne fait obstacle à la mise en mouvement de l’action publique, le procureur de la République territorialement compétent décide s’il est opportun :
1° Soit d’engager des poursuites ;
2° Soit de mettre en œuvre une procédure alternative aux poursuites en application des dispositions des articles 41-1 ou 41-2 ;
3° Soit de classer sans suite la procédure dès lors que les circonstances particulières liées à la commission des faits le justifient.
»

Le procureur doit motiver sa décision et l’adresser au plaignant par courrier.

Un classement sans suite ne signifie pas que votre plainte est irrecevable ou que les faits que vous dénoncez sont faux. Cela signifie simplement que le procureur estime qu’il n’y a pas assez d’éléments pour engager des poursuites ou qu’il existe une autre voie plus adaptée pour régler le litige.

Exemple d’un classement sans suite

Le Procureur de la République de Paris envoie dans la plupart des cas un avis de classement qui prend cette forme :

Madame/Monsieur,

 J’ai été rendu destinataire de la procédure établie par X à la suite de la plainte déposée par vos soins le (date).

 Comme vous le savez, des actes d’enquête ont été diligentés, pour les faits de (infraction) évoqués et l’ensemble des pièces a fait l’objet d’un examen approfondi de ma part.

 Après relecture attentive de l’entier dossier, je tenais à vous informer par ce courrier que je procède ce jour au classement de la procédure, les investigations ne permettant pas à mon sens d’envisager des poursuites pénales à l’encontre de (nom du mis en cause).

 Cette décision procédurale ne remet aucunement en cause votre ressenti et je vous invite, si vous en éprouvez le besoin, à prendre contact avec une association d’aide aux victimes telle que l’association PARIS AIDE AUX VICTIMES, afin que vous puissiez être soutenue et conseillée (numéro vert 080017 89 05 adresse électronique : bav.tj-paris@justice.fr).

 Par ailleurs, si vous le souhaitez, vous pouvez contester la décision de classement sans suite en effectuant un recours devant Monsieur le procureur général près la cour d’appel de PARIS ou en saisissant le Doyen des Juges d’instruction de PARIS d’une plainte avec constitution de partie civile.

 Restant à votre disposition pour toute demande complémentaire, je vous prie de recevoir, Madame/Monsieur l’expression de ma considération.

Quelles sont les raisons d’un classement sans suite ?

Il existe plusieurs motifs possibles pour un classement sans suite, parmi lesquels :

  • L’absence d’infraction : le procureur considère que les faits rapportés dans la plainte ne constituent pas une infraction pénale, mais relèvent plutôt du droit civil ou administratif.
  • L’infraction insuffisamment caractérisée : le procureur considère qu’il n’y a pas assez de preuves ou d’indices pour établir l’existence et la responsabilité de l’auteur de l’infraction.
  • L’auteur inconnu ou introuvable : le procureur ne dispose pas de l’identité ou de la localisation de l’auteur de l’infraction, ce qui rend impossible son interpellation et sa présentation devant un juge.
  • L’opportunité des poursuites : le procureur considère qu’il n’est pas nécessaire ou utile d’engager des poursuites au regard des circonstances, de la personnalité de l’auteur, du préjudice subi par la victime ou de l’intérêt général. Il peut alors proposer une alternative aux poursuites, comme un rappel à la loi, une médiation pénale, une composition pénale ou une injonction thérapeutique.
  • La prescription : le procureur constate que le délai pour engager des poursuites est écoulé depuis la commission des faits ou le dépôt de la plainte.
  • Et très rarement l’amnistie : le procureur constate que l’infraction fait l’objet d’une loi d’amnistie qui efface les poursuites et les condamnations.

Quels sont les recours possibles contre un classement sans suite du Procureur de la République ?

Si vous n’êtes pas satisfait de la décision du procureur de classer sans suite votre plainte, vous disposez de plusieurs recours :

Le recours hiérarchique

Vous pouvez demander au procureur général, supérieur hiérarchique du procureur de la République, de réexaminer votre plainte et d’éventuellement ordonner des poursuites. Vous devez adresser votre demande par courrier recommandé avec accusé de réception dans un délai de 3 mois à compter du classement sans suite. (En vertu de l’article 40-3 du Code de procédure pénale, « Toute personne ayant dénoncé des faits au procureur de la République peut former un recours auprès du procureur général contre la décision de classement sans suite prise à la suite de cette dénonciation. »)

La plainte avec constitution de partie civile

Vous pouvez saisir directement un juge d’instruction pour relancer l’action publique et demander réparation de votre préjudice. Vous devez adresser votre plainte par acte d’huissier au doyen des juges d’instruction du tribunal judiciaire compétent dans un délai de 3 mois à compter du classement sans suite. Vous devrez verser une consignation dont le montant sera fixé par le juge. Le juge d’instruction pourra alors mener une enquête approfondie et éventuellement renvoyer l’auteur présumé devant le tribunal correctionnel ou la cour d’assises.

La citation directe

Vous pouvez convoquer directement l’auteur présumé devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police, sans passer par un juge d’instruction. Vous devez adresser votre citation par acte d’huissier à l’auteur présumé et au procureur de la République dans un délai de 3 mois à compter du classement sans suite. Vous devrez également vous constituer partie civile pour demander réparation de votre préjudice. La citation directe n’est possible que si l’auteur est connu et que les faits sont simples et établis.

Voie civile

L’assignation devant le tribunal judiciaire pour le volet civil (indemnisation de votre préjudice, injonction de faire ou de ne pas faire, etc.)

Quels sont les délais pour agir après un classement sans suite ?

Si vous saisissez le tribunal directement, vous devez respecter le délai de prescription de l’action publique, c’est-à-dire le délai au-delà duquel les faits ne peuvent plus être poursuivis. Ce délai dépend de la nature de l’infraction4 :

  • 1 an pour les contraventions
  • 6 ans pour les délits
  • 20 ans pour les crimes

Le point de départ du délai de prescription est le jour où l’infraction a été commise, sauf exceptions. Par exemple, en cas d’infraction occulte ou dissimulée, le point de départ est le jour où l’infraction a été découverte.

Comment se sentir reconnu comme victime ?

Le classement sans suite de votre plainte peut être vécu comme une injustice ou un déni de votre souffrance. Vous pouvez avoir le sentiment que votre parole n’est pas prise en compte ou que votre préjudice n’est pas reconnu. Il est important de ne pas rester seul face à cette situation et de vous faire accompagner par des professionnels ou des associations spécialisées.

 Vous pouvez notamment :

  • Consulter un avocat : un avocat pourra vous conseiller sur les recours possibles et vous assister dans vos démarches. Il pourra également vous aider à évaluer votre préjudice et à demander une indemnisation adaptée.
  • Contacter une association d’aide aux victimes : une association d’aide aux victimes pourra vous écouter, vous soutenir et vous orienter vers les services compétents. Elle pourra par ailleurs vous informer sur vos droits et vos démarches.
  • Bénéficier d’un soutien psychologique : un soutien psychologique peut être nécessaire pour surmonter le traumatisme lié à l’infraction et au classement sans suite. Vous pouvez consulter un psychologue ou un psychiatre, ou solliciter une prise en charge par la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI).

Le classement sans suite de votre plainte n’est pas une fatalité ni une remise en cause de votre statut de victime. Vous disposez de recours pour faire valoir vos droits et obtenir réparation. N’hésitez pas à vous faire accompagner dans vos démarches.

Me Valentin SIMONNET

 

 

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