Révocation de l’ordonnance de clôture (+ modèle de conclusions)

L’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que si se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue. Cette révocation est prononcée soit d’office, soit à la demande des parties, par ordonnance motivée du juge de la mise en état, ou, après ouverture des débats, par décision du tribunal (CPC art. 803).

Lorsque la décision de révocation émane d’une ordonnance du juge de la mise en état, cette décision relève de son pouvoir propre. Elle ne peut donc pas être remise en cause devant la formation collégiale de la cour d’appel (Cass. 2e civ. 1-3-2018 n° 17-11.284 F-PB).

A qui adresser la demande de révocation de l’ordonnance de clôture ?

Aux termes de l’article 803 CPC alinéa 3

« L’ordonnance de clôture peut être révoquée, d’office ou à la demande des parties,

  • soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état,
  • soit, après l’ouverture des débats, par décision du tribunal ( CPC, art. 803, al. 3 ). »

Les demandes de révocation de l’ordonnance doivent être formées par voie de conclusions (Cass. 2e civ. 1-4-2004 n° 02-13.996 : Bull. civ. II n° 150).

Elles peuvent être adressées :

  • Soit au juge de la mise en état
    • Si le JME la rejette, il peut le faire par simple message RPVA, sans prendre d’ordonnance
    • Si le JME fait droit à la demande, il prend une ordonnance
  • Soit au tribunal au fond

Si elle est présentée au JME, il y a de fortes chances que le JME rende sa décision avant l’audience au fond.

La stratégie procédurale doit dicter le destinataire.

Comment justifier la révocation ?

Aux termes de l’article 803 du code de procédure civile (784 ancien):

« L’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue ; la constitution d’avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation.
Si une demande en intervention volontaire est formée après la clôture de l’instruction, l’ordonnance de clôture n’est révoquée que si le tribunal ne peut immédiatement statuer sur le tout.
L’ordonnance de clôture peut être révoquée, d’office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l’ouverture des débats, par décision du tribunal. »

La partie qui sollicite la révocation de l’ordonnance de clôture doit exposer avec précision la cause grave qu’elle invoque à l’appui de sa demande. Constituent notamment de telles causes graves le fait pour une partie de ne pas avoir été informée de la date de clôture (Cass. com., 9 avr. 2013, n° 12-14.967), ou encore la survenance d’un incident informatique ayant empêché la communication des pièces et conclusions récapitulatives avant cette date (CA Aix-en-Provence, 25 mars 2021, RG n° 18/20031).

Il résulte des articles 455 et 783, alinéa 2, du Code de procédure civile que sont recevables les conclusions postérieures à l’ordonnance de clôture lorsqu’elles tendent à sa révocation. Il appartient alors au juge, saisi d’une telle demande, d’y répondre expressément. Il ne peut se borner à constater la date de clôture pour statuer sur le fond, sans examiner la demande de révocation, fût-ce pour la rejeter (Cass. 2e civ., 25 mars 2021, n° 20-10.689).

La décision prononçant la révocation de l’ordonnance de clôture doit intervenir avant la clôture des débats ou s’accompagner d’une réouverture de ceux-ci (Cass. 1re civ., 11 févr. 2015, n° 13-28.054). Par conséquent, une même décision ne peut à la fois révoquer l’ordonnance de clôture et statuer sur le fond du litige (Cass. 2e civ., 1er mars 2018, n° 16-27.592).

Il va de soi que lorsque les conclusions et les pièces ont été communiquées postérieurement au prononcé de l’ordonnance de clôture, et que la juridiction a rejeté la demande de révocation, ces éléments demeurent irrecevables. La décision rendue ne saurait, dès lors, s’en inspirer (Cass. 2e civ., 5 mai 2011, n° 10-18.756).

Ne constituent pas une cause grave :

  • le changement d’avocat (CA Bordeaux, 25 avr. 2001) ;
  • le délai, suffisant, entre la communication des conclusions adverses et la clôture, permettant de répliquer utilement (Cass. 1re civ., 18 mai 2011, n° 10-11.909) ;
  • l’état de santé d’une partie n’ayant pu transmettre à temps les éléments à son conseil (CA Paris, 29 sept. 2000).

Justifient, en revanche, la révocation de l’ordonnance de clôture :

  • la communication, postérieurement à la clôture, d’une pièce susceptible d’influer sur la solution du litige (Cass. 1re civ., 27 févr. 2013, n° 12-11.517).
  • l’omission du tableau de l’Ordre de l’avocat d’une partie, la privant ainsi de son assistance (Cass. 2e civ., 8 juill. 2004, n° 02-15.374) ;
  • le retard dans l’octroi de l’aide juridictionnelle ayant empêché l’avocat d’intervenir (Cass. 2e civ., 6 mai 2004, n° 02-16.165 ; Bull. civ. II, n° 216 – Cass. 2e civ., 10 déc. 2009, n° 08-20.507) ;
  • la découverte de la majorité d’une partie après la clôture, afin de lui permettre de défendre elle-même ses droits (Cass. 1re civ., 6 oct. 1982, n° 227) ;

Modèle

CONCLUSIONS AUX FINS DE RÉVOCATION DE L'ORDONNANCE DE CLÔTURE ET RÉOUVERTURE DES DÉBATS
TRIBUNAL JUDICIAIRE de...
n° de Chambre
RG n° ...

POUR : SARL…, défenderesse
Maître Z, avocat au barreau de…, Toque n°
CONTRE : Monsieur et Madame X, demandeurs
Maître Y du barreau de…, Toque n°


Par assignation en date du…, Monsieur et Madame X sollicitent la mise en œuvre de la garantie décennale à l'encontre de la SARL… et demandent que cette dernière soit condamnée à leur payer la somme de… euros, montant des travaux de réfection évalués par Monsieur W…, expert judiciaire, désigné par une précédente ordonnance de référé en date du… Par la suite, les parties ont déposé leurs conclusions et ont communiqué leurs pièces respectives dans les délais impartis par la juridiction de céans s'agissant de la concluante.
Au terme de l'instruction, Monsieur le Juge de la mise en état a précisé que l'audience des plaidoiries était fixée le lundi 8 novembre 2021 à 14 h 00 et que la clôture interviendrait le lundi 6 septembre 2021.
Toutefois, par notification du vendredi 3 septembre 2021, Monsieur et Madame X ont déposé des conclusions récapitulatives et produit une nouvelle pièce, en l'espèce un rapport unilatéral d'un expert de compagnie d'assurances critiquant l'analyse de l'expert judiciaire et alléguant que le montant des travaux de réfection était supérieur à celui qui avait été précédemment chiffré. L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre conformément au calendrier qui avait été fixé.
Manifestement, les conclusions qui ont été notifiées par Monsieur et Madame X accompagnées d'une pièce nouvelle n'ont pas été transmises en temps utile. Compte tenu des délais d'échanges, même par voie informatique, le gérant de la défenderesse n'a pas pu en prendre connaissance au cours du congé de fin de semaine (le 3 septembre étant un vendredi) ni faire le point avec son conseil afin de répliquer, et ce d'autant que les ultimes conclusions des demandeurs font état d'éléments nouveaux et procèdent à une élévation importante des prétentions d'origine.

L'article 15 du Code de procédure civile dispose que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.
En présence d'écritures ou de pièces tardives, notifiées in extremis avant la clôture, le temps utile, essentiel au respect du contradictoire au sens des dispositions citées, n'a pas été respecté.
L'article 802 du Code de procédure civile précise qu'après l'ordonnance de clôture aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, mais il ajoute que sont cependant recevables les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture.

L'article 803 du même Code ajoute que, s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue, l'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit après l'ouverture des débats, par décision du tribunal.
Les présentes écritures - de pure procédure - sont donc recevables et la révocation de l'ordonnance de clôture s'impose afin de garantir le respect du principe de la contradiction que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer. Cette révocation permettra en effet à la SARL défenderesse de signifier utilement à son tour des conclusions responsives et récapitulatives.

PAR CES MOTIFS
Révoquer l'ordonnance de clôture intervenue le 6 septembre 2021
Dire que l'audience des plaidoiries est maintenue au lundi 8 novembre 2021 à 14 h 00
Fixer, le cas échéant, toute nouvelle date de clôture qu'il plaira avant le 8 novembre 2021
SOUS TOUTES RÉSERVES
Bordereau de pièces :
- Accusé de réception RPVA des conclusions des demandeurs
- Bordereau de pièces adverses

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