La rupture conventionnelle permet à un salarié et à son employeur de mettre fin au contrat de travail d’un commun accord. Contrairement à une démission ou un licenciement, elle présente l’avantage d’ouvrir droit aux allocations chômage. Mais comment bien la négocier pour obtenir des conditions favorables ?
Comprendre la rupture conventionnelle
La rupture conventionnelle est un dispositif issu du Code du travail (§ L.1237-11 et suivants). Elle permet de rompre un contrat à durée indéterminée (CDI) par un accord mutuel entre l’employeur et le salarié. Elle n’est pas accessible aux salariés en CDD.
Avantages pour le salarié :
- Indemnisation minimum légale ou conventionnelle
- Accès à l’assurance chômage
- Négociation des conditions de départ (indemnité, préavis, accompagnement)
Avantages pour l’employeur :
- Pas de contentieux prud’homal pour licenciement abusif
- Fin de contrat sans obligation de justification
- Maitrise des délais et des coûts
Préparer sa négociation
Ne jamais demander directement une rupture conventionnelle
Demander une rupture conventionnelle à votre employeur, c’est la chose à ne pas faire. Imaginez que vous demandiez la rupture conventionnelle à votre employeur et qu’il la refuse, puis cherche à vous licencier. Le licenciement apparaîtra d’autant plus crédible que l’employeur pourra brandir votre demande de rupture conventionnelle et dire : “à partir du moment où je lui ai refusé sa rupture conventionnelle, il a arrêté de travailler, il a tout fait pour être licencié.”
Donc, en réalité, si vous voulez une rupture conventionnelle, il faut bâtir une stratégie avec un avocat pour amener l’employeur, de lui-même, à vous proposer cette rupture conventionnelle. Et si vous êtes bien conseillé, cette négociation peut être assez rapide. J’ai des ruptures conventionnelles qui sont signées en un mois ou deux.
Évaluer ses arguments
Avant d’ouvrir la discussion, il est essentiel d’évaluer ses atouts et les intérêts de l’employeur à accepter une rupture conventionnelle :
- Ancienneté et difficulté à vous remplacer
- Tensions ou restructurations en cours
- Volonté de changement de votre part
- Coût potentiel d’un licenciement pour l’employeur
Analyser les indemnités
L’indemnisation de la rupture conventionnelle ne peut être inférieure à l’indemnisation légale de licenciement (§ L.1237-13 du Code du travail). Toutefois, elle peut être renégociée à la hausse.
Calculez l’indemnisation minimale :
- 1/4 de mois de salaire par année d’ancienneté jusqu’à 10 ans
- 1/3 de mois de salaire par année au-delà de 10 ans
Exemple : Un salarié avec 12 ans d’ancienneté et un salaire brut de 3 000 € percevra au minimum :
- (10 x 3 000 × 1/4) + (2 x 3 000 × 1/3) = 7 500 € + 2 000 € = 9 500 €
Techniques de négociation
Négociation avec le DRH : comment ne pas se faire avoir ?
Choisir le bon moment
Engager la discussion lors d’une période où l’entreprise traverse des difficultés ou cherche à réduire ses effectifs peut jouer en votre faveur.
Valoriser votre départ
Faites comprendre à votre employeur qu’une séparation amiable est avantageuse pour lui :
- Aucun risque de prud’hommes
- Transition facilitée
- Image positive de l’entreprise
Négocier au-delà du minimum légal
Ne vous contentez pas du minimum, négociez :
- Une indemnisation plus élevée
- Un préavis aménagé ou une dispense de travail
- Une prise en charge de la formation
- Une portabilité de la mutuelle
Procédure et validation
La tenue du ou des entretiens
En ce qui concerne la tenue du ou des entretiens, la loi n’exige aucune formalité particulière (C. trav., art. L. 1237-12).
Il a par exemple été jugé qu’un entretien pouvait avoir lieu dans un endroit extérieur à l’entreprise (par exemple, dans un bar : CA Bourges 9-11-2012 n°11-01636).
Il est également possible de s’inspirer des principes dégagés par certains juges dans des cas où un entretien préalable à licenciement s’est déroulé en visio-conférence, à savoir :
- Les droits du salarié sont respectés et il est en mesure de se défendre utilement (CA Versailles 4-6-2020 n°17/04940)
- Le salarié a formulé son accord à la tenue d’un entretien en visio-conférence (CA Rennes 11-5-2016 n°14/08483)
Rien n’interdit la tenue d’un entretien en visio-conférence, pour peu que le salarié soit à l’initiative de cette demande ou qu’il ait formulé son accord et que les conditions de tenue de l’entretien permettent au salarié de bénéficier d’une assistance effective et garantissent sa liberté de consentement.
Signature du formulaire (convention)
Une fois l’accord trouvé, une convention de rupture doit être signée, précisant :
- La date de rupture du contrat
- Le montant de l’indemnité
Le formulaire de rupture doit être daté et signé par l’employeur et le salarié et un exemplaire remis au salarié.
Ainsi est nulle une rupture conventionnelle dont un exemplaire daté et signé n’a pas été remis au salarié (Cass. soc. 3-7-2019 n°17-14.232). En effet pour la Cour de cassation seule la remise au salarié d’un exemplaire de la convention signé des deux parties lui permet de demander l’homologation de la convention et d’exercer son droit de rétractation en toute connaissance de cause.
Au vu de ces exigences, il est nécessaire d’adapter et de sécuriser la signature et la preuve de la transmission du formulaire dans l’hypothèse d’une procédure uniquement en distanciel (formalisation d’un accusé de réception par le salarié, signature électronique, prise en compte des délais postaux éventuels en ce qui concerne la date de signature et de la remise…).
Délai de rétractation
Un délai de 15 jours calendaires est prévu (§ L.1237-14 du Code du travail) pour rétractation après signature.
Homologation par la DREETS
La convention doit être validée par la DREETS (ex-DIRECCTE), qui dispose de 15 jours pour se prononcer. Sans réponse, l’accord est homologué automatiquement.
Que faire en cas de refus de l’employeur ?
Si votre employeur refuse la rupture conventionnelle, plusieurs options s’offrent à vous :
- Insister sur les avantages mutuels
- Proposer un aménagement progressif du départ
- Envisager une démission (sans allocation chômage) ou un licenciement pour négocier une transaction
Conclusion
La rupture conventionnelle est un excellent moyen de quitter une entreprise dans de bonnes conditions. En préparant soigneusement votre négociation et en valorisant votre départ, vous pouvez obtenir des conditions avantageuses tout en sécurisant votre avenir professionnel.
Besoin d’un accompagnement juridique ?
Si vous souhaitez être assisté dans votre négociation ou en cas de litige, n’hésitez pas à me contacter. Je vous aiderai à optimiser votre départ et à faire valoir vos droits.