L’injonction de rencontrer un médiateur

Vous avez reçu une injonction de rencontrer un médiateur, souvent intitulée « injonction d’information à la médiation », et vous vous demandez ce que cela signifie, ce qu’on attend de vous et si cette démarche est payante.
Il ne s’agit pas d’une médiation au sens propre, mais d’une invitation du juge à assister à une réunion d’information gratuite. Cette réunion, animée par un médiateur agréé, a pour seul objectif de vous présenter la médiation, d’en expliquer le fonctionnement, les avantages et les conditions dans lesquelles elle peut être mise en œuvre.
Vous restez libre d’y participer et surtout libre d’accepter ou de refuser d’entrer ensuite en médiation. Ce n’est donc ni une tentative de conciliation, ni une audience supplémentaire, mais une étape d’information préalable, destinée à vous aider à comprendre si la médiation pourrait convenir à votre situation.
Autrement dit, l’injonction de rencontrer un médiateur n’est pas une sanction, mais une opportunité offerte par le juge pour favoriser un règlement amiable et plus rapide du litige, sans renoncer à vos droits.

Les textes

L’injonction de rencontrer un médiateur a d’abord été instaurée en matière familiale (articles 255 et 373-2-10 du code civil).
La loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a ensuite généralisé la faculté, pour tout juge, de délivrer une injonction de rencontrer un médiateur.
L’article 127-1 du code de procédure civile prévoit ainsi qu’« à défaut d’avoir recueilli l’accord des parties prévu à l’article 131-1, le juge peut leur enjoindre de rencontrer, dans un délai qu’il détermine, un médiateur chargé de les informer de l’objet et du déroulement d’une mesure de médiation. Cette décision est une mesure d’administration judiciaire ».

L’objectif

C’est souvent la méconnaissance de la médiation, de son intérêt et de ses enjeux qui explique les hésitations des parties à y recourir. D’où l’utilité de leur permettre de rencontrer un médiateur dans le cadre d’une réunion d’information, afin de les sensibiliser à l’existence de la médiation et aux bénéfices concrets qu’elles peuvent en tirer.

La distinction entre injonction et médiation

L’injonction de rencontrer un médiateur ne doit pas être confondue avec la médiation elle-même.
Elle consiste uniquement en une réunion d’information gratuite et sans engagement, destinée à présenter ce qu’est la médiation, ses principes, son déroulement et ses effets.
Les parties sont simplement invitées à rencontrer un médiateur agréé afin d’être informées de cette possibilité, mais aucune discussion sur le fond du litige n’a lieu à ce stade.
La médiation, en revanche, suppose un accord exprès des parties pour entrer dans un processus structuré de règlement amiable du différend, conduit par un médiateur impartial et confidentiel.
Ainsi :
L’injonction est une mesure d’administration judiciaire, qui ne préjuge en rien du déroulement ou de l’issue du litige ;
La médiation est une mesure juridictionnelle ou conventionnelle, qui suspend les délais de procédure et peut aboutir à un accord ayant valeur exécutoire une fois homologué.
Autrement dit, l’injonction vise uniquement à informer ; la médiation, à résoudre le différend.

Le rôle proactif du juge

En misant sur le rôle proactif du juge et sur son autorité, le législateur a souhaité, en 2019, rendre la médiation réellement effective dans les juridictions. Tout juge, y compris en référé, peut désormais enjoindre les parties de rencontrer un médiateur. Cette mesure répond à un constat : selon le rapport Justice du XXIe siècle, à peine 1 % des affaires font l’objet d’une médiation, contre neuf sur dix au Québec.

Un instrument efficace de développement de l’amiable

Souple et facile à mettre en œuvre, cette injonction, qui constitue une mesure d’administration judiciaire, est un outil efficace tant en procédure écrite qu’en référé.
En référé, elle permet d’instaurer très rapidement un processus amiable, avant même l’audience — par exemple lors d’une autorisation d’assigner d’heure à heure. Elle peut aussi être délivrée à l’audience, lorsque les parties sont présentes, notamment si une permanence de médiateurs est organisée, ou encore pendant un renvoi, pour exploiter une phase d’attente dans la procédure. Même postérieurement à la décision, elle peut accompagner une mesure d’expertise.
Le juge peut acter cette injonction par une simple mention au dossier, sans formalité particulière, en indiquant la date de renvoi avant laquelle les parties doivent rencontrer le médiateur. Il peut également la remettre directement à l’audience et inviter les parties à prendre rendez-vous sans délai, éventuellement avec le médiateur de permanence. En procédure écrite, elle peut être notifiée via le RPVA.
L’injonction est particulièrement pertinente lorsque les parties ont intérêt à préserver un lien ou à rechercher une solution mutuellement satisfaisante.
Pour en renforcer l’efficacité, le modèle d’injonction peut préciser que « l’inexécution de cette injonction, sans motif légitime, est susceptible de constituer un défaut de diligences justifiant une radiation de l’affaire du rôle, ou pourra être prise en compte au titre de l’équité dans l’appréciation des demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ».

L’exécution de la mesure d’injonction

La réussite de cette mesure suppose la présence effective des parties, en capacité de négocier. Si une réunion en présentiel s’avère difficile, l’information peut être délivrée en visioconférence.
L’entretien d’information est gratuit et purement explicatif. Les parties peuvent, si elles le souhaitent, décider d’entrer immédiatement en médiation conventionnelle (articles 1530 et suivants du code de procédure civile), avant, pendant ou après le rendez-vous, sans que le tribunal soit dessaisi. Si elles y consentent, le médiateur peut commencer sa mission sans délai.
La présence des avocats est vivement recommandée : la médiation fait désormais partie intégrante des modes de règlement des différends. Dans la pratique, ces réunions permettent souvent des échanges constructifs entre les parties et leurs conseils.
À l’issue de l’information, les parties peuvent informer le juge de leur souhait d’engager une médiation judiciaire ou, au contraire, lui demander de trancher le litige.
Il est d’ailleurs fréquent que cette rencontre incite les parties à négocier directement entre elles, sans entrer en médiation, puis à solliciter l’homologation de leur accord ou le constat de leur désistement d’instance.

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