Traitement des antécédents judiciaires (TAJ) : tout comprendre

Le TAJ, pour Traitement des antécédents judiciaires, est un fichier de police largement méconnu du grand public, mais dont les conséquences peuvent être très concrètes. On peut y figurer sans avoir jamais été condamné, parfois pendant de nombreuses années, et s’en apercevoir brutalement à l’occasion d’un refus d’emploi, d’une enquête administrative ou d’une procédure de naturalisation.
Comprendre ce qu’est le TAJ, ce qu’il contient, qui peut le consulter et comment exercer ses droits est donc essentiel.

Le TAJ, c’est quoi exactement

Le TAJ est un fichier du ministère de l’Intérieur, partagé entre la police nationale et la gendarmerie nationale.
Il a été créé pour répondre à une finalité précise : faciliter la constatation des infractions pénales, le rassemblement des preuves et la recherche de leurs auteurs.

Il s’agit d’un outil de police judiciaire, à ne pas confondre avec le casier judiciaire.
Contrairement au casier, le TAJ ne recense pas uniquement des condamnations définitives : il peut contenir des informations relatives à des personnes simplement mises en cause, y compris en l’absence de toute condamnation.

Qui peut être inscrit au TAJ ?

Suis-je inscrit au traitement d’antécédents judiciaires (TAJ) ?

Le TAJ contient des données concernant principalement :

  • les personnes mises en cause dans le cadre d’enquêtes judiciaires (auteurs ou complices présumés) ;
  • les victimes d’infractions.

Une inscription peut ainsi résulter :

  • d’une garde à vue,
  • d’une audition libre,
  • d’une plainte ayant donné lieu à une enquête,
  • même si la procédure s’est ensuite soldée par un classement sans suite, un non-lieu, une relaxe ou un acquittement.

À titre d’ordre de grandeur, le TAJ est un fichier massif : il regroupe plusieurs dizaines de millions de fiches, dont plusieurs millions de personnes mises en cause.

Ainsi, en cas de simple passage en garde à vue, vous êtes immédiatement inscrits au TAJ.

Quelles données sont enregistrées

Les informations conservées dans le TAJ portent notamment :

  • sur les personnes : identité, date et lieu de naissance, nationalité, adresse, situation familiale ;
  • sur les faits : nature de l’infraction, dates, lieux, circonstances.

Pour les personnes mises en cause, des photographies peuvent également être enregistrées.

À quoi sert le TAJ et qui peut le consulter

Dans le cadre des enquêtes judiciaires

Le TAJ est consulté par les services de police et de gendarmerie, les douanes judiciaires et les magistrats, dans le cadre de leurs missions de police judiciaire.

Dans le cadre des enquêtes administratives

Le TAJ est également utilisé lors de certaines enquêtes administratives de sécurité, notamment pour :

  • des emplois liés à la sécurité privée,
  • la défense ou la sécurité nationale,
  • la SNCF, la RATP,
  • le transport de fonds,
  • la protection physique des personnes,
  • l’accès à des zones sensibles (centrales, sites stratégiques),
  • certaines procédures de naturalisation, de titres de séjour ou de visas.

Point fondamental :
dans une enquête administrative, il n’est pas possible de consulter les informations concernant :

  • une victime ;
  • une personne mise en cause ayant bénéficié de certaines décisions judiciaires favorables (classement sans suite, non-lieu, relaxe, acquittement, ou dispense de mention au casier judiciaire).

Combien de temps les données sont conservées

Les durées de conservation varient selon le statut de la personne et la gravité de l’infraction.

Pour les majeurs mis en cause :

  • principe : 20 ans ;
  • réduction possible à 5 ans pour certaines infractions (notamment certains délits routiers ou usages de stupéfiants) ;
  • allongement possible jusqu’à 40 ans pour les crimes et certaines infractions graves (violences graves, agressions sexuelles, blanchiment, abus de biens sociaux, etc.).

Pour les mineurs mis en cause :

  • principe : 5 ans ;
  • dérogations possibles à 10 ans ou 20 ans selon les infractions.

Pour les victimes :

  • conservation pendant 15 ans.

Une règle pratique importante :
en cas de nouvelle infraction, la durée de conservation la plus longue peut s’appliquer à l’ensemble des mentions.

Quels sont vos droits sur les données du TAJ

Les personnes concernées disposent de plusieurs droits fondamentaux : droit à l’information, droit d’accès, droit de rectification et, sous conditions, droit à l’effacement.

La procédure est strictement encadrée.

Le droit d’accès

Le droit d’accès permet de savoir :

  • si vous êtes inscrit au TAJ,
  • quelles données y figurent,
  • pour quelle finalité,
  • pendant combien de temps,
  • et quels en sont les destinataires.

La demande doit être adressée au ministère de l’Intérieur, en précisant expressément qu’elle porte sur le fichier TAJ, et accompagnée d’une pièce d’identité.

Le ministère dispose d’un délai de deux mois pour répondre.
L’absence de réponse ou un refus partiel peut constituer une restriction du droit d’accès.

Le recours en cas de silence ou de refus

En cas d’absence de réponse ou de refus, il est possible de saisir la CNIL dans le cadre de la procédure dite de droit d’accès indirect.
La CNIL intervient alors comme intermédiaire et contrôle la licéité de la conservation et de l’accès aux données.

La rectification et l’effacement : comment demander l’effacement de son inscription au TAJ ?

Lorsque les données sont inexactes, incomplètes, non mises à jour ou lorsque leur conservation n’est plus justifiée, une demande de rectification ou d’effacement peut être formulée.

En pratique, ces démarches sont souvent techniques et les délais peuvent être longs, ce qui justifie fréquemment l’accompagnement par un avocat, notamment lorsque les conséquences professionnelles ou administratives sont importantes.

Requête au procureur par LRAR au visa des articles art. 230-8 et R. 40-31 du code de procédure pénale

Un fichier utile, mais sensible

Le TAJ est un outil indispensable au fonctionnement de la police judiciaire.
Mais sa taille, la durée de conservation des données et les difficultés de mise à jour ont conduit l’autorité de contrôle à rappeler à plusieurs reprises l’exigence de rigueur dans sa gestion.

Une information inexacte ou obsolète peut, en pratique, avoir des effets disproportionnés sur la vie d’une personne qui n’a pourtant jamais été condamnée.

En résumé

Le TAJ n’est ni un casier judiciaire, ni un simple fichier administratif anodin.
C’est un fichier de police aux effets très concrets, dont il est possible — et parfois indispensable — de demander l’accès, la rectification ou l’effacement.

En cas de difficulté, d’enjeu professionnel ou de procédure sensible, un accompagnement juridique permet souvent de sécuriser et d’accélérer les démarches.

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