Exception de nullité pour vice de forme

Généralités

Inobservation d’une formalité de procédure antérieure aux débats
Les développements suivants ne concernent que ” l’inobservation d’une formalité de procédure antérieure aux débats ” ( CPC, art. 116 . – Cass. soc., 12 sept. 2007, n° 06-13.667 : JurisData n° 2007-040342 ; JCP G 2007, IV, 2821 ; Procédures 2007, comm. 273 , R. Perrot).
• pour la nullité des débats, voir l’ article 446 du Code de procédure civile ;
• pour la nullité du jugement, voir l’article 458 du Code de procédure civile. La possibilité de régularisation, prévue par l’article 121 du Code de procédure civile en cas de nullité d’un acte de procédure ne s’applique pas aux nullités de jugement ( Cass. 2e civ., 2 avr. 1990, n° 89-11.516 : JurisData n° 1990-000914 ; Bull. civ. II, n° 70 ).

§ 9 Distinction avec l’irrecevabilité
Certains textes sanctionnent l’absence de certaines mentions non par une nullité mais par une irrecevabilité. Il s’agit alors d’une fin de non-recevoir et il n’y a alors pas lieu d’appliquer les règles spécifiques aux exceptions de nullité pour vice de forme (notamment l’exigence d’un grief).
Ainsi sont irrecevables des conclusions en appel dès lors que leur auteur dissimule son adresse personnelle et n’est pas domicilié au lieu mentionné dans ses dernières conclusions (Cass. 2e civ., 1er oct. 2009, n° 08-12.417 : JurisData n° 2009-049675 ; Procédures 2009, comm. 385, note R. Perrot, application de l’ article 961 du Code de procédure civile ).
Dans la formulation applicable à l’époque, l’article 885 du Code de procédure civile disposait que, devant le tribunal paritaire des baux ruraux, ” la demande est formée et le tribunal saisi par déclaration faite, remise ou adressée au greffe du tribunal ou par acte d’huissier de justice adressé à ce greffe “, en conséquence ” la cour d’appel, qui a retenu que, pour que la saisine du tribunal soit régulière, le demandeur devait s’adresser au secrétariat de la juridiction et non au défendeur et en a exactement déduit qu’il y avait donc eu utilisation d’une procédure irrégulière qui devait être sanctionnée sans qu’il soit besoin de justifier d’un grief, a légalement justifié sa décision ” (Cass. 3e civ., 24 janv. 2001, n° 99-13.196 : JurisData n° 2001-007880 ; Bull. civ. III, n° 6 ; Procédures 2001, comm. 132 , J. Junillon).
§ 10 Champ d’application de l’exception de nullité pour vice de forme
L’exception de nullité porte sur tous les actes de procédure antérieurs aux débats, en particulier les actes d’huissier de justice (aujourd’hui : commissaires de justice. – CPC, art. 649 . – Cass. 3e civ., 14 déc. 1994, n° 92-21.263 : JurisData n° 1994-002353 ; Bull. civ. III, n° 215 ), les notifications (CPC, art. 694) et les ” décisions et actes d’exécution relatifs aux mesures d’instruction ” ( CPC, art. 175 ).
L’exception de nullité ne peut pas s’appliquer s’il ne s’agit pas d’un acte de procédure ( Cass. com., 19 févr. 2002, n° 99-20.256 , inédit : JurisData n° 2002-013373, défaut d’application à l’avertissement du représentant des créanciers, adressé dans le cadre de l’article L. 621-43 du Code de commerce applicable à l’époque – aujourd’hui C. com., art. L. 622-24 ).

§ 11 Notion de vice de forme

” Il résulte [des articles 114 et 117 du Code de procédure civile] que, dans un acte de procédure, l’erreur relative à la dénomination d’une partie n’affecte pas la capacité à ester en justice qui est attachée à la personne, quelle que soit sa désignation, et ne constitue qu’un vice de forme, lequel ne peut entraîner la nullité de l’acte que sur justification d’un grief ” (Cass. 2e civ., 4 févr. 2021, n° 20-10.685, P : JurisData n° 2021-001299 ; Procédures 2021, comm. 91, obs. R. Laffly. – Cass. 2e civ., 4 mars 2021, n° 19-22.844 , inédit).

” Le défaut de désignation de l’organe représentant légalement une personne morale dans un acte de procédure, lorsque cette mention est prévue à peine de nullité, ne constitue qu’un vice de forme ” (Cass. ch. mixte, 22 févr. 2002, n° 00-19.639 : JurisData n° 2002-013229 ; Bull. ch. mixte, n° 1 ; BICC 1er avr. 2002, p. 4 , avis de Gouttes et note Peyrat ; JCP G 2002, 1563 ; RTD civ. 2002, p. 358 , obs. R. Perrot ; Rev. huissiers 2002, p. 230 , note N. Fricero ; Procédures 2002, comm. 70 et 73, note R. Perrot ; Rev. sociétés 2002, p. 293 , note Y. Chartier ; Dr. sociétés 2002, comm. 168, note Th. Bonneau. – Cass. 2e civ., 28 févr. 2006, n° 03-17.849 : JurisData n° 2006-032425 ; Bull. civ. II, n° 55 ; JCP G 2006, II, 10146 , note E. Putman ; D. 2006, IR p. 801. – Cass. soc., 31 mars 2009, n° 08-60.517 : JurisData n° 2009-047683 ; Bull. civ. V, n° 100 ; JCP G 2009, IV, 1792 ; Procédures 2009, comm. 180 , note R. Perrot. – Cass. 3e civ., 15 avr. 2021, n° 19-25.449 , inédit : JurisData n° 2021-005411 ).

” La mention erronée de l’organe représentant légalement la personne morale dans l’acte de surenchère (n’est) pas une irrégularité de fond affectant la validité de l’acte devant être accueillie sans que celui qui l’invoque ait à justifier d’un grief dans les termes des articles 117 et 119 du code de procédure civile, mais ne (constitue) qu’un vice de forme relevant de l’article 114 du même code nécessitant à charge de celui qui l’invoque de démontrer un grief et, en tout état de cause susceptible d’être couvert ” ( Cass. 2e civ., 3 déc. 2015, n° 14-25.134 , inédit : JurisData n° 2015-029893 ; Procédures 2016, comm. 48 – V. aussi Cass. com., 5 déc. 2018, n° 17-20.564 17-23.045, inédit : JurisData n° 2018-022414. – Cass. 2e civ., 14 nov. 2019, n° 18-20.303, P : JurisData n° 2019-020186).
” L’absence de signature des conclusions, déposées au greffe conformément à l’article R. 311-6 du code des procédures civiles d’exécution, constitue une irrégularité de forme, qui ne peut entraîner la nullité de l’acte que s’il est justifié d’un grief ” ( Cass. 2e civ., 4 nov. 2021, n° 20-16.393, P : JurisData n° 2021-017557).
§ 12 Division
Tout vice de forme n’entraîne pas la nullité d’un acte (V. n° 13 ). L’exception de nullité n’est recevable qu’à des conditions précises (V. n° 26 ). Enfin l’annulation n’est elle-même prononcée qu’à certaines conditions (V. n° 34 ).

Cas de nullité pour vice de forme

Aux termes de l’ article 114 du Code de procédure civile , en principe ” aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi “.
C’est la règle ” pas de nullité sans texte “.
Même si la nullité n’est pas expressément prévue par la loi, elle est néanmoins encourue ” en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public ” ( CPC, art. 114 ).
Il s’ensuit que la nullité résulte soit d’un texte soit de la violation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

1° Nullité expressément prévue par la loi

§ 14 Exemples
Il n’est bien entendu pas possible, ici, de dresser une liste de tous les textes prévoyant expressément une nullité pour vice de forme. Nous nous proposons seulement de donner des exemples de qualification de vice de forme qui nous ont paru caractéristiques.

a) Actes de commissaire de justice

§ 15 Mentions prescrites à peine de nullité dans tout acte de commissaire de justice
Rappelons que, depuis le 1er juillet 2022, ” les huissiers de justice et les commissaires-priseurs judiciaires sont réunis au sein de la profession de commissaire de justice ” (Ord. n° 2016-728, 2 juin 2016, art. 25, relative au statut de commissaire de justice). ” Dans tous les textes réglementaires […] la référence aux huissiers de justice et aux huissiers désigne les commissaires de justice ” (D. n° 2022-949, 29 juin 2022, art. 67, relatif aux conditions d’exercice des commissaires de justice).
Aux termes de l’article 648 du Code de procédure civile :
Tout acte d’huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs :
• 1. Sa date ;
• 2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;
• b) Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement.
• 3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l’huissier de justice ;
• 4. Si l’acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social.
Ces mentions sont prescrites à peine de nullité.
Sur l’ensemble de la question, V. JCl. Procédures Formulaire, V° Actes d’huissier de justice en matière civile, fasc. 10 .

b) Notifications

§ 16 Mentions générales relatives aux significations d’actes de commissaire de justice
Aux termes de l’article 693 du Code de procédure civile :
Ce qui est prescrit par les articles 654 à 659, 663 à 665-1, 672, 675, 678, 680, 683 à 684-1, 686, le premier alinéa de l’article 688 et les articles 689 à 692 est observé à peine de nullité.
Doivent être également observées, à peine de nullité les dispositions des articles 4, 6, 7 et 8, paragraphes 1,2 4 et 5 du règlement (CE) n° 1393/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 en cas d’expédition d’un acte vers un autre État membre de l’Union européenne.
Les mentions d’un acte d’huissier de justice (aujourd’hui : commissaire de justice) font foi jusqu’à inscription de faux ( Cass. ch. mixte, 6 oct. 2006, n° 04-17.070 : JurisData n° 2006-035301 ; JCP G 2006, act. 490 ; Bull. civ. ch. mixte, n° 8 , rejet de l’exception de nullité d’une assignation soulevée par le défendeur au motif que, contrairement à la mention portée dans l’acte, signifié en mairie, la lettre prévue par l’article 658 du Code de procédure civile n’aurait pas été envoyée dans les délais légaux).
Sur l’ensemble de la question, V. JCl. Procédures Formulaire, V° Actes d’huissier de justice en matière civile, fasc. 10 .
§ 17 Mentions dans les notifications de jugement
Par référence à l’article 693 du Code de procédure civile, sont prescrites à peine de nullité les dispositions des articles 675 (en principe, notification des jugements par voie de signification) ; 678 (notification préalable entre avocats, dans les procédures à représentation obligatoire) et 680 (mention de la voie de recours ouverte, du délai et des conséquences d’un recours abusif).
Sur l’ensemble de la question, V. JCl. Procédures Formulaire, V° Actes d’huissier de justice en matière civile, fasc. 10 .
En pratique on rappellera spécialement que ” l’absence de mention ou la mention erronée dans l’acte de notification d’un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités a pour effet de ne pas faire courir le délai de recours ” (Cass. 2e civ., 31 janv. 2002, n° 00-20.690, inédit : JurisData n° 2002-013105. – Cass. 2e civ., 2 févr. 2004, n° 02-13.332 : JurisData n° 2004-022255 ; Bull. civ. II, n° 57 ; D. 2004, Somm., p. 1203, obs. P. Julien. – Cass. 2e civ., 19 nov. 2009, n° 08-12.134, inédit : JurisData n° 2009-050405. – Cass. 2e civ., 14 nov. 2013, n° 12-25.454 : JurisData n° 2013-025537 ; Bull. civ. II, n° 220 . – Cass. 2e civ., 13 nov. 2014, n° 13-24.547, FS-D : JurisData n° 2014-027599 ; Procédures 2015, comm. 3. – Cass. 2e civ., 24 sept. 2015, n° 14-23.768 P : JurisData n° 2015-021062 ; JCP G 2015, 1124, obs. D. Cholet ; Procédures 2015, comm. 357, note Ch. Laporte. – Cass. 2e civ., 9 avr. 2015, n° 14-18.772 : JurisData n° 2015-007579. – V. aussi, Cass. 3e civ., 30 janv. 2008, n° 07-10.999 P : JurisData n° 2008-042515 ; JCP G 2009, I, 83, obs. M. Huyghe ; Bull. civ. III, n° 20 ).

c) Demandes initiales

§ 18 Mentions dans toutes demandes initiales
Aux termes de l’article 54 du Code de procédure civile :
À peine de nullité, la demande initiale mentionne :
1° L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
2° L’objet de la demande ;
3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;
b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;
4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;
5° Lorsqu’elle doit être précédée d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d’une telle tentative.
§ 19 Mentions complémentaires dans les assignations
Aux termes de l’article 56 du Code de procédure civile :
L’assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice et celles énoncées à l’article 54 :
1° Les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée ;
2° Un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé ;
4° L’indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.
Il y a lieu de tenir compte en plus des règles propres à la juridiction et à la procédure suivie.

§ 20 Mentions complémentaires dans les requêtes
Aux termes de l’ article 57 du Code de procédure civile , la requête :
contient, outre les mentions énoncées à l’article 54, également à peine de nullité :

  • lorsqu’elle est formée par une seule partie, l’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;
  • dans tous les cas, l’indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.
    Elle est datée et signée.
    ” L’irrégularité ou l’absence d’une signature figurant sur la requête ou la déclaration de saisine relève du régime de la nullité des actes pour vice de forme prévu à l’ article 114 du code de procédure civile , qui ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire de prouver un grief et qui, selon l’article 115, peut être couverte par la régularisation ultérieure de l’acte ” (cas d’une requête présentée irrégulièrement sous forme électronique ; régularisation possible par signature manuelle de la requête à l’audience : Cass. 1re civ., 23 sept. 2020, n° 19-12.894, P : JurisData n° 2020-014738 . – Cass. 2e civ., 1er juill. 2021, n° 19-25.743 , inédit).
    Il y a lieu de tenir compte en plus des règles propres à la juridiction et à la procédure suivie.
    d) Déclarations d’appel

§ 21 Déclaration d’appel dans la procédure avec représentation obligatoire

Aux termes de l’article 901 du Code de procédure civile :
La déclaration d’appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et par le cinquième alinéa de l’article 57, et à peine de nullité :
• 1° La constitution de l’avocat de l’appelant ;
• 2° L’indication de la décision attaquée ;
• 3° L’indication de la cour devant laquelle l’appel est porté ;
• 4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
Elle est signée par l’avocat constitué. Elle est accompagnée d’une copie de la décision. […].
Du fait des renvois opérés doivent donc également figurer, à peine de nullité :
• l’objet de la demande ;
• l’identification des demandeurs, soit :
o pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs,
o pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;
• la date et la signature.

Attention : Il ne s’agit ici que d’énumérer les cas de nullité et non les irrecevabilités notamment en cas de défaut d’utilisation de la communication électronique.

§ 22 Déclaration d’appel dans la procédure sans représentation obligatoire
Aux termes de l’article 933 du Code de procédure civile :
La déclaration comporte les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et par le troisième alinéa de l’article 57. Elle désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqués auquel l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l’adresse du représentant de l’appelant devant la cour. Elle est accompagnée de la copie de la décision.
Il convient donc de respecter les règles prévues au 2° et 3° de l’article 54 et au troisième alinéa de l’article 57 qui exigent, à peine de nullité :
• l’objet de la demande ;
• l’identification des demandeurs, soit :
o pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs,
o pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;
• la date et la signature.
” L’absence de signature de l’acte d’appel formé au nom d’une personne identifiée constitue une irrégularité de forme qui ne peut entraîner la nullité de l’acte que s’il est justifié d’un grief ” (Cass. 2e civ., 23 mai 2013, n° 12-16.933 : Bull. civ. II, n° 100 . – Cass. 2e civ., 22 janv. 2015, n° 13-24.606 , inédit : JurisData n° 2015-000634. – Cass. 2e civ., 28 mai 2015, n° 13-19.599, inédit : JurisData n° 2015-012496 ).
Sur l’ensemble de la question, V. JCl. Procédures Formulaire, V° Cour d’appel, fasc. 60

2° Nullité résultant de l’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public

§ 23 Notion
Par formalité substantielle, il faut entendre celle qui tient à la raison d’être de l’acte, et qui lui est indispensable pour remplir son objet ( Cass. 2e civ., 3 mars 1955 : JCP A 1955, II, 8654 , obs. G.M.).
Une formalité d’ordre public relève plutôt du caractère impératif de la règle de procédure énoncée.
Sur un plan pratique, la qualification de substantielle ou d’ordre public relève de l’appréciation des tribunaux.
§ 24 Exemples de formalités substantielles
Ont, notamment, été expressément considérés comme présentant un caractère substantiel, dont l’omission doit, en principe, être sanctionnée par la nullité :
• la mention par l’expert, dans son rapport, du dire écrit d’une partie, conformément aux dispositions de l’article 276 du Code de procédure civile ( Cass. 3e civ., 3 oct. 1991, n° 89-12.943 : JurisData n° 1991-002321 ; Bull. civ. III, n° 227 . – Cass. com., 18 févr. 1992, n° 89-19.330 : JurisData n° 1992-000478 ; JCP G 1992, I, 3629, obs. L. Cadiet ; Bull. civ. IV, n° 79 , mais absence d’annulation, en raison de l’absence de grief) ;
• ” l’absence d’établissement d’un pré-rapport, en méconnaissance des termes de la mission d’expertise, constitue l’inobservation d’une formalité substantielle, sanctionnée par une nullité pour vice de forme qui ne peut être prononcée qu’à charge pour celui qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité ” (Cass. 2e civ., 29 nov. 2012, n° 11-10.805 : JurisData n° 2012-027516 ; Bull. civ. II, n° 192 ; JCP G 2013, 15 , note D. Cholet ; RTD civ. 2013, p. 172 , note R. Perrot ; Dr. et proc. 2013, p. 55 , note N. Fricero) ;
• le défaut de prestation de serment d’un expert (Cass. 1re civ., 19 oct. 2016, n° 15-25.879, P+B+I : JurisData n° 2016-021484 ; Procédures 2016, comm. 356, obs. Y. Strickler) ;
• les irrégularités et les imprécisions affectant un commandement de payer (visa de textes sans rapport avec les baux de locaux commerciaux, indication de deux délais de nature et de portée différentes) n’ayant pas permis à la société preneuse de prendre la mesure exacte des injonctions et d’y apporter une réponse appropriée dans le délai requis, il convient d’en prononcer la nullité (Cass. 3e civ., 3 oct. 2007, n° 06-16.361 : JurisData n° 2007-040635 ; JCP G 2007, IV, 2990 ; D. 2007, p. 2612, note Y. Rouquet).
• le défaut de mention des déclarations des parties, dans un procès-verbal de comparution personnelle, sur lequel n’ont même pas été portées leurs signature (Cass. 2e civ., 28 mars 1977, n° 75-15.692 : Bull. civ. II, n° 99 ) ;
• ” les actes de publicité préalable à l’adjudication constituent une formalité substantielle, sanctionnée par une nullité pour vice de forme qui ne peut être prononcée qu’à charge pour celui qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité ” (Cass. 2e civ., 13 janv. 2022, n° 20-18.155 : JurisData n° 2022-000223 ; Dalloz actualité, 28 janv. 2022, obs. C. Bléry ; JCP G 2022, 352, note C. Laporte ; Gaz. Pal. Rec. 2022, obs. C. Brenner ; RTD civ. 2022, p. 541 , obs. N. Cayrol).
§ 25 Exemples d’absence de caractère substantiel ou d’ordre public
Ont, notamment, été expressément retenus comme n’étant ni substantiel, ni d’ordre public :
• le défaut de paraphe d’une mention marginale contenue dans un acte d’huissier (Cass. 2e civ., 11 oct. 1989, n° 88-15.552 : JurisData n° 1989-703260 ; Bull. civ. II, n° 172 ) ;
• les règles de forme prescrites par l’ article 202 du Code de procédure civile pour les attestations produites en justice (Cass. soc., 9 oct. 1996, n° 93-45.604 : JurisData n° 1996-003866 ; Procédures 1997, comm. 11 . – Cass. 2e civ., 18 mars 1998, n° 95-10.210 : JurisData n° 1998-001265 ; JCP G 1998, IV, 2086 ) ;
• le dépassement de sa mission par le technicien commis (Cass. com., 11 juill. 1995, n° 89-14.197, inédit : JurisData n° 1995-002370 ; Procédures 1995, comm. 259 , obs. R. Perrot) ;
• la délivrance d’une assignation par un huissier autre que celui qui a été désigné par l’ordonnance autorisant à assigner à jour fixe ( Cass. 2e civ., 7 mars 1973, n° 72-10.120 : Bull. civ. II, n° 90 ) ;
• le défaut de mention du nom de la personne physique qui agit pour une personne morale dans une assignation (Cass. 2e civ., 1er oct. 2009, n° 08-19.399, inédit : JurisData n° 2009-049734) ;
• le défaut de mention du nom du clerc assermenté ayant procédé à la signification d’un acte (Cass. com., 11 juin 2014, n° 13-18.064 : JurisData n° 2014-012958 ; Bull. civ. IV, n° 9 . – Cass. 2e civ., 11 avr. 2019, n° 17-23.272, P).

Le cas spécifique de la désignation de l’organe

La mention de l’organe représentant une personne morale et son défaut : tout comprendre

Conditions de recevabilité de l’exception de nullité

§ 26 Mention de la cause de la nullité
L’exception de nullité n’est valablement soulevée que si la cause de la nullité invoquée est précisée et la motivation doit précéder tout moyen de défense au fond (Cass. 2e civ., 19 mai 1999, n° 97-11.373 : JurisData n° 1999-002110 ; JCP G 1999, IV, 2282 ; Bull. civ. II, n° 93 ).
§ 27 Auteur de l’exception de nullité
” Il résulte de l’ article 114 du code de procédure civile , prévoyant qu’un acte ne peut être annulé qu’à charge pour celui qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, que seul le destinataire d’un acte est recevable à se prévaloir de la nullité de cet acte en raison d’une irrégularité de forme l’affectant ” (Cass. 2e civ., 1er sept. 2016, n° 15-16.918, P : JurisData n° 2016-016032 ; RTD civ. 2016, p. 932 , obs. N. Cayrol. – Cass. 2e civ., 27 juin 2019, n° 18-12.617 : JurisData n° 2019-012864 ).

1° Moment auquel l’exception doit être invoquée

§ 28 Droit d’invoquer la nullité après l’accomplissement de l’acte
Aux termes de l’article 112 du Code de procédure civile : ” La nullité des actes de procédure peut être invoquée au fur et à mesure de leur accomplissement “.
C’est pratiquement plus une obligation qu’un droit sans quoi la nullité risque d’être couverte.

§ 29 Couverture de la nullité
La nullité ” est couverte si celui qui l’invoque a, postérieurement à l’acte critiqué, fait valoir des défenses au fond ou opposé une fin de non-recevoir sans soulever la nullité ” (CPC, art. 112. – V. récemment : Cass. 2e civ., 2 déc. 2021, n° 20-10.692, P : JurisData n° 2021-019367 ; JCP G 2021, 1353 ).
Est irrecevable la demande de nullité du cahier des conditions de vente présentée après les défenses au fond, dans le cadre d’une procédure de saisie immobilière (Cass. 2e civ., 1er oct. 2009, n° 08-19.104 : JurisData n° 2009-049673 ; Procédures 2009, comm. 397 , note R. Perrot ; D. 2009, p. 2973, note A. Leborgne).
Est également irrecevable l’exception de nullité soulevée à titre subsidiaire et après une fin de non-recevoir (Cass. 2e civ., 14 avr. 2005, n° 03-16.682 : JurisData n° 2005-028007 ; Bull. civ. II, n° 95 ; JCP G 1995, IV, 2263 ).
Le défendeur ayant demandé au tribunal de constater que le congé ne reposait sur aucun motif légitime sans invoquer préalablement à cette défense au fond le moyen tiré de la nullité de la sommation, la cour d’appel en a déduit, à bon droit, qu’il était irrecevable, en application de l’article 112 du Code de procédure civile, à invoquer la nullité du congé ( Cass. 3e civ., 2 juin 2010, n° 09-14.194 : JurisData n° 2010-007833 ; Bull. civ. III, n° 109 ; JCP E 2010, 1650 ; Loyers et copr. 2010, comm. 290, note P.-H. Brault).
Mais la lettre contenant de simples protestations et réserves adressée par le destinataire d’un commandement, ne peut être assimilée à un moyen de défense au fond et l’exception de nullité reste recevable ( CA Paris, 1re ch., sect. urg. A, 19 oct. 1987 : JurisData n° 1987-027426 ).
§ 30 Connaissance de l’irrégularité
Les juges du fond doivent rechercher si l’exception de nullité, bien que soulevée après les défenses au fond, n’est pas recevable compte tenu de la date à laquelle celui qui l’invoque a eu connaissance du fait entraînant la nullité (Cass. 1re civ., 15 janv. 1991, n° 89-05.003 : JurisData n° 1991-700583 ; Bull. civ. I, n° 18 . – Cass. 2e civ., 21 sept. 2000, n° 98-13.632 : JurisData n° 2000-006016 ; Bull. civ. II, n° 129 ).
§ 31 Exception de nullité devant le tribunal judiciaire
Rappelons qu’aux termes de l’article 789 du Code de procédure civile :
Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
1° Statuer sur les exceptions de procédure […] ;
Les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions […] ultérieurement à moins qu'[elles] ne surviennent ou soient révélé[e]s postérieurement au dessaisissement du juge ;
[…]
Aux termes de l’article 791 du Code de procédure civile : ” Le juge de la mise en état est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées “.
§ 32 Exception de nullité devant la cour d’appel
La nullité de l’acte de procédure ne peut pas être valablement soulevée pour la première fois en appel, dès lors que la partie a conclu au fond en première instance (Cass. com., 25 avr. 2001, n° 98-19.503 : JurisData n° 2001-009472. – Cass. 2e civ., 12 juill. 2001, n° 99-19.924 : JurisData n° 2001-010797. – Cass. 3e civ., 27 mai 2003, n° 02-11.515 : JurisData n° 2003-019188 ; Bull. civ. III, n° 112 ; JCP G 2003, 2300. – Cass. 1re civ., 12 déc. 2006, n° 04-15.099 : JurisData n° 2006-036435 ; JCP G 2007, IV, 1131. – Cass. com., 15 avr. 2008, n° 07-12.487 : JurisData n° 2008-043661 ; JCP G 2008, IV, 1983).
Mais l’exception de nullité pour vice de forme présentée avant toute défense au fond en première instance peut être reprise en appel après avoir conclu au fond devant la cour et jusqu’aux dernières conclusions ( Cass. 2e civ., 8 févr. 2001, n° 98-20.840 : JurisData n° 2001-008034 ; Procédures 2001, comm. 119, obs. R. Perrot ; Bull. civ. II, n° 25 ).
Elle peut être soulevée pour la première fois devant la cour par la partie défaillante en première instance.
Rappelons qu’aux termes de l’ article 914 du Code de procédure civile , ” les parties soumettent au conseiller de la mise en état, qui est seul compétent depuis sa désignation et jusqu’à la clôture de l’instruction, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat , tendant à : […] déclarer l’appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l’appel “, étant précisé que ” les moyens tendant à l’irrecevabilité de l’appel doivent être invoqués simultanément à peine d’irrecevabilité de ceux qui ne l’auraient pas été “. Il en résulte que ” les exceptions de nullité d’actes de procédure doivent être soulevées avant toute défense au fond, dans des conclusions spécialement adressées au conseiller de la mise en état, seul compétent pour statuer sur l’irrecevabilité de l’appel et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l’appel ” (Cass. 2e civ., 10 déc. 2020, n° 19-22.609 : JurisData n° 2020-020172).
Le conseiller de la mise en état, dont les attributions ne concernent que les exceptions de procédure et les incidents relatifs à l’instance d’appel, n’est pas compétent pour statuer sur une exception de procédure relative à la première instance (Cass., avis, 2 avr. 2007, n° 07-00.004 et 00-70.007 : JurisData n° 2007-038458 ; JCP G 2007, IV, 1952 ; Procédures 2007, comm. 160, note R. Perrot. – V. également, Cass. 2e civ., 7 mai 2008, n° 07-14.784 : JurisData n° 2008-043794 ; Bull. civ. II, n° 107 ; JCP G 2008, IV, 2016 ; Gaz. Pal. 2009, p. 2714 , obs. E. du Rusquec. – Cass. 1re civ., 8 juill. 2009, n° 08-17.401 : JurisData n° 2009-049075).

2° Concentration des moyens de nullité

§ 33 Obligation d’invoquer simultanément tous les moyens de nullité
Aux termes de l’article 113 du Code de procédure civile : ” Tous les moyens de nullité contre des actes de procédure déjà faits doivent être invoqués simultanément à peine d’irrecevabilité de ceux qui ne l’auraient pas été ” (Cass. 2e civ., 28 oct. 1999, n° 97-16.979 : JurisData n° 1999-003767 ).

C. Conditions de l’annulation

§ 34 Exclusion d’une nullité relevée d’office
La nullité pour vice de forme ne peut pas être relevée d’office (Cass. 2e civ., 21 juill. 1986, n° 84-16.110 : JurisData n° 1986-001506 ; Bull. civ. II, n° 132 . – Cass. 2e civ., 23 oct. 1991, n° 90-14.334 : JurisData n° 1991-002644 ; JCP G 1991, IV, p. 453 ; Bull. civ. II, n° 276 ).
Elle ne peut donc résulter que d’une véritable exception de procédure.
Le juge qui se borne à rechercher le régime juridique de cette nullité et à vérifier l’absence ou la réunion de ses conditions d’application, ne viole pas le principe de la contradiction en n’invitant pas les parties à formuler leurs observations (Cass. 2e civ., 17 nov. 2005, n° 04-10.741 : JurisData n° 2005-030721 ; Bull. civ. II, n° 297 ; JCP G 2005, IV, 3663 ; Procédures 2006, comm. 4, note R. Perrot).
§ 35 Division
L’acte affecté d’un vice de forme n’est annulé que si le vice cause un grief (V. n° 36 ) à moins que l’acte n’ait été régularisé (V. n° 45 ).
Enfin dans le cas des opérations d’instruction, une disposition limite la portée de l’annulation (V. n° 48 ).
1° Pas de nullité sans grief

§ 36 Nécessité du grief
Aux termes de l’ article 114 du Code de procédure civile : ” La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public “.
La nécessité du grief est rappelée par une jurisprudence constante et pléthorique (par exemple : Cass. 2e civ., 11 mars 1999, n° 95-21.119 : JurisData n° 1999-001140. – Cass. 2e civ., 3 juin 1999, n° 97-14.159 : JurisData n° 1999-002341 ; Bull. civ. II, n° 107 . – Cass. com., 14 nov. 2000, n° 98-11.456 : JurisData n° 2000-006880. – Cass. 2e civ., 3 oct. 2002, n° 00-21.088 : JurisData n° 2002-015750. – Cass. com., 3 déc. 2002, n° 01-03.026 : JurisData n° 2002-016954 . – Cass. com., 25 mars 2003, n° 01-03.040 : JurisData n° 2003-018702. – Cass. 1re civ., 6 janv. 2004, n° 01-15.668 : JurisData n° 2004-021913 ; Procédures 2004, comm. 71 , note R. Perrot. – Cass. 2e civ., 10 mars 2004, n° 02-20.192 : JurisData n° 2004-022920. – Cass. 2e civ., 8 avr. 2004, n° 02-13.257 : JurisData n° 2004-023395. – Cass. 1re civ., 11 juin 2009, n° 09-60.035 : JurisData n° 2009-048500. – Cass. 1re civ., 8 juill. 2009, n° 07-19.465 : JurisData n° 2009-049069 ; Procédures 2009, comm. 322, note M. Douchy-Oudot. – Cass. 2e civ., 8 févr. 2018, n° 17-10.451 , inédit : JurisData n° 2018-001698 ; Dr. et proc. 2018, p. 93 , note Choquet. – Cass. 2e civ., 22 mars 2018, n° 17-10.576 : JurisData n° 2018-004244 ; publié au Bulletin ; JCP G 2018, 411, obs. S. Dorol ; Procédures 2018, comm. 182 , obs. Ch. Laporte ; Dr. et proc. 2018, p. 107 , note Mourre-Schreiber).
§ 37 Actes concernés par la nécessité d’un grief
” L’ article 114 du Code de procédure civile ne peut recevoir application concernant un acte extrajudiciaire ” (Cass. 1re civ., 5 mars 2002, n° 00-13.511 : JurisData n° 2002-013313 ; Bull. civ. I, n° 77 ).
Les dispositions du Code de procédure civile ne s’appliquent pas à la procédure suivie devant le Conseil de la concurrence (devenu l’Autorité de la Concurrence) ; les déclarations recueillies dans des conditions déloyales doivent être écartées sans que la partie intéressée ait à démontrer l’existence d’un préjudice particulier (Cass. com., 14 janv. 2003, n° 00-16.962 : JurisData n° 2003-017254 ; Bull. civ. IV, n° 7 ; Contrats, conc. consom. 2003, comm. 56 , note M. Malaurie-Vignal ; D. 2003, AJ, p. 493).
§ 38 Nécessité d’un lien de causalité entre la nullité et le grief
Le grief permettant de justifier, au titre de l’ article 114 du Code de procédure civile , la nullité d’un acte de procédure pour vice de forme ne doit pas être confondu avec le préjudice causé par l’action en justice. Il doit trouver sa cause dans l’irrégularité dénoncée et correspond aux conséquences de cette irrégularité sur la suite de la procédure (Cass. ch. mixte, 22 févr. 2002, n° 00-19.639 et 00-19.742 : JurisData n° 2002-013229 ; Bull. civ. ch. mixte, n° 1 ; JCP G 2002, 1563 ; Procédures 2002, comm. 70 et 73, note R. Perrot ; RTD civ. 2002, p. 358 , obs. R. Perrot).
Il ne suffit donc pas d’invoquer l’irrégularité de l’acte, et, par ailleurs, l’existence d’un grief. Il faut que le grief résulte directement de l’irrégularité de forme invoquée ( Cass. 1re civ., 6 janv. 2004, n° 01-15.668 : JurisData n° 2004-021913 ; Procédures 2004, comm. 70, obs. R. Perrot). Cette condition s’applique même s’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public ( CPC, art. 114, al. 2 . – Cass. 2e civ., 16 déc. 1999, n° 98-11.410 : JurisData n° 1999-004607 ).
§ 39 Charge de la preuve du grief
Aux termes de l’ article 114 du Code de procédure civile : ” La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public “.
Il appartient à la partie qui invoque la nullité d’un acte de procédure de préciser et de prouver le grief que lui cause l’irrégularité. Une cour d’appel ne peut pas retenir d’office un grief non invoqué (Cass. 3e civ., 9 mars 1994, n° 91-16.941 : JurisData n° 1994-000386 ; Bull. civ. III, n° 49 . – Cass. com., 16 avr. 1996, n° 93-10.758 : JurisData n° 1996-001706. – Cass. 2e civ., 23 oct. 1996, n° 94-15.194 : JurisData n° 1996-004000 ; Bull. civ. II, n° 239 ).
§ 40 Vice de forme imputable à celui qui l’invoque
Les juges doivent rechercher si la partie qui invoque la nullité peut se prévaloir d’une erreur qu’elle a elle-même provoquée (Cass. 2e civ., 25 mars 1999, n° 96-16.481 : JurisData n° 1999-001296. – Cass. 2e civ., 16 mars 2000, n° 98-14.580, inédit : JurisData n° 2000-001073 . – Cass. 2e civ., 17 avr. 2008, n° 07-15.266 : JurisData n° 2008-043645 ; Bull. civ. II, n° 96 ; JCP G 2008, IV, 1964).
§ 41 Appréciation souveraine des juges du fond
Les juges du fond apprécient souverainement si l’irrégularité de forme fait grief à celui qui l’invoque ( Cass. 3e civ., 18 janv. 1995, n° 92-20.067 : JurisData n° 1995-000032 ; Bull. civ. III, n° 18 . – Cass. 3e civ., 5 avr. 1995, n° 93-16.914 : JurisData n° 1995-001768. – Cass. 2e civ., 16 mars 2004, n° 02-30.834 : JurisData n° 2004-022846 ; Bull. civ. II, n° 122 ; JCP G 2004, 1981 ; TPS 2004, comm. 157. – Cass. 2e civ., 27 mai 2004, n° 02-20.160 : JurisData n° 2004-023897 ; Bull. civ. II, n° 249 ; JCP G 2004, 2475 . – Cass. 2e civ., 23 sept. 2004, n° 02-18.252 : JurisData n° 2004-024892 ; Bull. civ. II, n° 426 ; JCP G 2004, 3058 ; Procédures 2004, comm. 257).
§ 42 Décisions et actes d’exécution relatifs aux mesures d’instruction
Dans le cas particulier des mesures d’instruction ” l’omission ou l’inexactitude d’une mention destinée à établir la régularité d’une opération ne peut entraîner la nullité de celle-ci s’il est établi, par tout moyen, que les prescriptions légales ont été, en fait, observées ” (CPC, art. 178).
§ 43 Exemples de cas dans lesquels un grief a été retenu
Ont, notamment, été retenus comme justifiant une annulation, en raison du grief résultant du vice de forme dénoncé :
• la délivrance de tous les actes de procédure à l’adresse qui, à la connaissance du demandeur, n’était pas celle du défendeur, le défendeur ayant, de ce fait, été dans l’impossibilité de faire valoir sa défense ( CA Lyon, 21 févr. 1991 : JurisData n° 1991-600274) ;
• l’irrégularité de la notification de l’assignation au ministère public dans le cadre d’une action en diffamation car cette irrégularité avait une incidence sur la validité de la procédure et l’interruption de la courte prescription applicable en matière de presse (Cass. 1re civ., 18 oct. 2005, n° 04-14.820 : JurisData n° 2005-030308 ; Bull. civ. I, n° 369 ; JCP G 2005, IV, 3453 ).
• l’absence ou l’inexactitude, dans l’acte d’appel, de la mention du domicile de l’appelant est de nature à faire grief s’il est justifié qu’elle nuit à l’exécution du jugement déféré à la cour d’appel (Cass. 2e civ., 14 juin 2001, n° 99-16.582 : JurisData n° 2001-010080 ; Bull. civ. II, n° 117 . – Cass. 2e civ., 14 juin 2001, n° 99-13.485 : JurisData n° 2001-010079 ; Bull. civ. II, n° 118 ; RTD civ. 2001, p. 664 , obs. R. Perrot. – Cass. 2e civ., 21 nov. 2002, n° 01-00.935 : JurisData n° 2002-016429 ; Bull. civ. II, n° 262 ; JCP G 2003, 1061. – Cass. 2e civ., 13 juill. 2005, n° 03-14.980 : JurisData n° 2005-029463 ; Bull. civ. II, n° 193 ; JCP G 2005, IV, 3075).

§ 44 Exemples de cas dans lesquels un grief n’a pas été retenu
Il en est ainsi, notamment, lorsque :

  • absence de grief résultant de l’absence de mention, dans un acte de procédure, de l’organe représentant légalement une personne morale (Cass. 2e civ., 19 oct. 2000, n° 98-18.336 : JurisData n° 2000-006411 . – Cass. ch. mixte, 22 févr. 2002, n° 00-19.639 et 00-19.742 : JurisData n° 2002-013229 ; Bull. civ. ch. mixte, n° 1 . – Cass. ch. mixte, 22 févr. 2002, n° 00-20.398 : JurisData n° 2002-013230 ; Procédures 2002, comm. 70 et 73, note R. Perrot. – Cass. 2e civ., 11 juill. 2002, n° 01-11.603 : JurisData n° 2002-015252. – Cass. 2e civ., 11 juill. 2002, n° 00-19.645 : JurisData n° 2002-015512. – Cass. com., 17 sept. 2002, n° 00-14.884 : JurisData n° 2002-015612) ;
  • l’absence de grief résulte de la comparution à l’audience ( CA Paris, 16e ch., 21 avr. 1988 : JurisData n° 1988-024139, mention dans l’assignation d’une heure d’audience inexacte. – Cass. soc., 15 déc. 1999, n° 98-60.497 : JurisData n° 1999-004522, irrégularité de la convocation) ;
  • • l’absence de grief résulte de la constitution d’avocat postulant auquel tout acte peut être adressé ou demandé (Cass. 1re civ., 6 juin 1990, n° 88-19.698 : JurisData n° 1990-001829, défaut d’indication, par le défendeur, de son domicile, de surcroît connu du demandeur. – Cass. 2e civ., 25 nov. 2004, n° 02-12.829 : JurisData n° 2004-025805 ; JCP G 2005, IV, 1017 ; Bull. civ. II, n° 505 ) ;
  • • la cour d’appel a souverainement retenu, sans dénaturation, qu’il résultait d’une lettre adressée par le demandeur à l’avocat du défendeur que ce dernier avait eu immédiatement connaissance de l’assignation introductive d’instance, de sorte qu’il n’établissait pas le grief invoqué et concernant les modalités de délivrance de l’assignation à la mairie du siège social (Cass. 3e civ., 24 oct. 2007, n° 06-19.379 : JurisData n° 2007-041006 ; JCP G 2007, IV, 3118 ; Procédures 2007, comm. 272, note R. Perrot ; D. 2007, p. 2812) ;
  • • le gérant de tutelle ayant représenté les victimes devant la juridiction pénale a qualité pour procéder aux actes d’exécution de la décision pénale ; en l’absence de grief, l’omission des noms des victimes dans ces actes n’est pas de nature à entraîner leur nullité (Cass. 2e civ., 24 févr. 2005, n° 03-11.718 : JurisData n° 2005-027095 ; Bull. civ. II, n° 49 ; JCP G 2005, 1735 ; Procédures 2005, comm. 91 ) ;
  • • ayant constaté que les actes destinés à la société avaient été délivrés à la personne de sa gérante, à son domicile personnel, la cour d’appel, par ce seul motif, a exactement retenu qu’il n’y avait pas lieu de prononcer la nullité de ces actes (Cass. 2e civ., 30 avr. 2009, n° 07-15.562 : JurisData n° 2009-047960 ; JCP G 2009, IV, 1903 ; Procédures 2009, comm. 185 , R. Perrot).
  • • le grief résultant de l’insuffisance ou l’irrégularité des mentions concernant l’identification de l’autre partie n’est pas démontré (Cass. 2e civ., 3 juill. 1996, n° 94-21.670 : JurisData n° 1996-002985. – Cass. 2e civ., 4 févr. 1998, n° 95-18.373 : JurisData n° 1998-000580. – Cass. soc., 15 déc. 1999, n° 97-43.709 : JurisData n° 1999-004517) ;
  • • absence de grief résultant du défaut de signature de l’huissier instrumentaire dans la signification du jugement à l’avocat destinataire (Cass. 2e civ., 16 mars 2000, n° 98-14580, inédit : JurisData n° 2000-001073 ).

2° Absence de régularisation de l’acte

§ 45 Couverture de la nullité

Aux termes de l’article 115 du Code de procédure civile : ” La nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief “.
§ 46 Absence de persistance d’un grief
Pour écarter la nullité d’un acte pour vice de forme, les juges du fond doivent préalablement constater que la régularisation effectuée ne laisse subsister aucun préjudice (Cass. com., 1er déc. 1987, n° 86-12.729 : JurisData n° 1987-002222 ; Bull. civ. IV, n° 254 ).
Inversement pour prononcer la nullité, les juges du fond doivent constater que la régularisation intervenue laisse subsister un préjudice ( Cass. 2e civ., 13 juin 1990, n° 88-19.828 : JurisData n° 1990-002130 ; Bull. civ. II, n° 131 ; D. 1991, jurispr. p. 336, note E. du Rusquec. – Cass. 2e civ., 4 mars 2021, n° 19-13.344 et 19-14.055 : JurisData n° 2021-002688 ; JCP G 2021, 542, note R. Laffly).

§ 47 Décisions et actes d’exécution relatifs aux mesures d’instruction
Dans le cas particulier des mesures d’instruction, ” les opérations peuvent être régularisées ou recommencées, même sur-le-champ, si le vice qui les entache peut être écarté ” (CPC, art. 177).
3° Limitation de la portée de l’annulation

§ 48 Décisions et actes d’exécution relatifs aux mesures d’instruction
Dans le cas particulier des mesures d’instruction, ” la nullité ne frappe que celles des opérations qu’affecte l’irrégularité ” ( CPC, art. 176 ).

Sources

EncyclopédiesJurisClasseur Procédures Formulaire V° Exceptions de procédure – Fasc. 40 : EXCEPTIONS DE PROCÉDURE. – Exception de nullité – Hervé Croze

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