Convocation à l’assemblée générale : qui a le pouvoir ?

Par principe, c’est le représentant légal de la société, c’est à dire son dirigeant (gérant, président), qui convoque les associés à l’assemblée générale. Mais, dans certains cas, le gérant peut être défaillant ou ne pas vouloir convoquer une assemblée générale qui a pour but sa révocation. Dans ce cas, comment faire ?

SARL

Le gérant

Principe : le gérant convoque l’AG

Le soin de convoquer les assemblées incombe à la gérance de la SARL (C. com. art. L 227-27, al. 2).

S’il y a plusieurs gérants, le droit de convocation peut être librement déterminé dans les statuts (C. com. art. L 223-18, al. 4) et confié soit à chaque gérant, soit à tous les gérants agissant collectivement. En l’absence de clause statutaire, chacun des gérants peut convoquer l’assemblée sans que les autres gérants puissent faire opposition.
En cas de carence du gérant, c’est au commissaire aux comptes chargé d’un audit classique des comptes, s’il en existe un, qu’il appartient de faire le nécessaire (C. com. art. L 223-27, al. 2).

Exception : indisponibilité du gérant (absence ou tutelle)

Lorsqu’une SARL se trouve dépourvue de gérant pour quelque cause que ce soit (décès, démission, révocation, etc.) ou lorsque le gérant unique est placé sous tutelle, tout associé peut convoquer l’assemblée générale à seule fin de procéder, le cas échéant, à la révocation du gérant et, dans tous les cas, à la désignation d’un ou plusieurs nouveaux gérants (C. com. art. L 223-27, al. 8). Cette faculté n’est pas subordonnée à la détention d’une fraction minimale du capital et s’exerce selon les modalités de convocation habituelles, sous réserve d’une particularité tenant au délai de convocation. Il convient de préciser que le placement du gérant unique sous une mesure de protection autre que la tutelle (curatelle, sauvegarde de justice, etc.) n’entre pas dans le champ de ce dispositif.

Par ailleurs, un ou plusieurs associés détenant la moitié des parts sociales, ou représentant au moins 10 % des associés et détenant 10 % des parts sociales, peuvent demander la réunion d’une assemblée au gérant, ou, à défaut, au commissaire aux comptes chargé d’un audit classique des comptes, s’il en existe un (C. com. art. L 223-27, al. 4).

Le commissaire aux comptes, lorsqu’il est désigné et chargé d’un audit classique, peut également convoquer l’assemblée générale pour la désignation ou la révocation d’un gérant. Toutefois, le commissaire aux comptes d’une SARL ayant opté pour l’audit allégé des comptes est dispensé de cette obligation (C. com. art. L 821-57, al. 2, ord. 2023-1142 du 6-12-2023).

Convocation de l’assemblée de SARL par un mandataire ad hoc

Tout associé de SARL peut aussi demander au président du tribunal de commerce, statuant en référé, la désignation d’un mandataire chargé de convoquer l’assemblée et de fixer son ordre du jour (C. com. art. L 223-27, al. 7 et R 223-20, dernier al.).

Article L223-27 « Tout associé peut demander en justice la désignation d’un mandataire chargé de convoquer l’assemblée et de fixer son ordre du jour.« 

Article R223-20 « Le mandataire chargé de convoquer l’assemblée dans le cas prévu par le septième alinéa de l’article L. 223-27 est désigné par ordonnance du président du tribunal de commerce statuant en référé.« 

Pour être recevable, la demande doit être conforme à l’intérêt social (Cass. com. 19-6-1990 : Bull. civ. IV n° 186 ; Cass. com.15-12-2021 n° 20-12.307 FS-B). La conformité à l’intérêt social ne s’apprécie pas au regard de la décision que le demandeur entend soumettre à l’assemblée (Cass. 3e civ. 19-9-2024 n° 23-12.846 F-D, à propos d’une société civile mais transposable), de sorte que lorsque l’assemblée envisagée a pour objet la révocation du gérant, le juge n’a pas à examiner les motifs de cette révocation (Cass. com. 15-12-2021 précité).

Convocation de l’AG par les associés de SARL

Incompétence de principe des associés pour convoquer l’assemblée

Sauf exception (vacance de la gérance), le Code de commerce ne reconnaît pas aux associés (individuellement ou en groupe) le droit de convoquer eux-mêmes une assemblée générale.

Ceux-ci ne peuvent qu’inviter le gérant ou, à défaut, le commissaire aux comptes chargé d’un audit classique des comptes s’il en existe un, à procéder à la convocation de l’assemblée.

En cas de carence du gérant, les associés peuvent alors demander en justice la désignation d’un mandataire chargé de procéder à cette convocation mais ces dispositions excluent la convocation directe de l’assemblée générale par les associés (Cass. com. 4-3-1974 n° 73-10.284 P, SARL Imprimerie nouvelle de l’Alsace centrale c/ S.).

Toute assemblée convoquée directement par un associé est donc irrégulière et le juge peut en prononcer l’annulation.

Certes, une convocation effectuée par un associé majoritaire sous « l’égide et le contrôle » d’un administrateur judiciaire désigné à cette fin par le juge des référés sur demande du gérant a été jugée régulière (Cass. com. 24-5-1994 n° 92-21.699 D : RJDA 10/94 n° 1035). Mais ce sont les circonstances de l’espèce, tenant à l’intervention de l’administrateur judiciaire, qui ont conduit les juges à valider cette convocation, dont l’irrégularité formelle n’avait été contestée par le gérant qu’en appel.

Convocation par les associés en cas de « vacance » de la gérance

Voir ci-dessus

Aménagements statutaires relatifs à la convocation par les associés

Est-il possible d’insérer dans les statuts une clause octroyant une faculté de convocation directe aux associés en cas de carence du gérant en la matière ?
On peut penser qu’en ne permettant aux associés de demander la réunion d’une assemblée que sous certaines conditions et en réputant toute clause contraire non écrite (C. com. art. L 223-27, al. 6), le Code de commerce interdit les clauses statutaires de ce type. Il est vrai qu’offrir une telle faculté aux associés prive de tout intérêt les mécanismes mis en place par la loi pour permettre aux associés de demander au gérant de convoquer l’assemblée ou de demander en justice la désignation d’un mandataire chargé de cette convocation.
La Cour de cassation ne s’est jamais expressément prononcée sur cette question. Toutefois, dans une décision de 1974, elle semble avoir implicitement admis la possibilité de prévoir une clause autorisant les associés à convoquer une assemblée : dans cette affaire, les statuts comportaient une telle faculté et la Cour de cassation a reproché aux associés de ne pas avoir respecté le formalisme requis par les statuts pour sa mise en œuvre (Cass. com. 4-3-1974 n° 73-10.284 P, SARL Imprimerie nouvelle de l’Alsace centrale c/ S. : Bull. civ. IV n° 77).

En l’espèce, les statuts précisaient qu’un ou plusieurs associés représentant plus de la moitié du capital pouvaient convoquer l’assemblée à défaut de convocation par le gérant huit jours après une mise en demeure. La convocation décidée en application de cette clause a été jugée irrégulière aux motifs suivants :

  • l’assemblée n’avait pas été convoquée conformément aux dispositions des statuts puisque les associés avaient procédé directement à cette convocation sans avoir préalablement mis le gérant en demeure de le faire ;
  • à cette irrégularité s’ajoutaient le non-respect du délai légal requis entre la date de la convocation et celle de la réunion de l’assemblée ainsi que le défaut d’envoi des documents dont la loi exige la communication aux associés avant toute assemblée ;
  • pour excuser ces irrégularités, les associés ne pouvaient pas utilement invoquer l’impérieuse nécessité de mettre les statuts en conformité avec les dispositions de la loi du 24 juillet 1966 (désormais reprise dans le Code de commerce) (obligation de transformer la société ou d’augmenter son capital) avant l’expiration du délai légal car la carence ou la négligence du gérant n’était pas susceptible de couvrir ces manquements graves et importants ;
  • enfin, tous les associés n’étaient pas présents ou représentés lors de l’assemblée litigieuse.

Convocation demandée par les associés (c’est une simple demande !)

Un ou plusieurs associés détenant la moitié des parts sociales ou détenant, s’ils représentent au moins 10 % des associés, 10 % des parts sociales, peuvent demander la réunion d’une assemblée ; toute clause contraire est réputée non écrite (C. com. art. L 223-27, al. 4 et 6).

Aucune clause statutaire ne saurait donc limiter, voire supprimer ce droit. Il n’est pas non plus possible d’abaisser statutairement le seuil de détention requis.
Destinataire de la demande de convocation émanant des associés

En l’absence de précision sur ce point, la demande de convocation doit être adressée à l’organe habilité par la loi à procéder à la convocation, c’est-à-dire au gérant ou, en cas de refus de celui-ci, au commissaire aux comptes chargé d’un audit classique des comptes, s’il en existe un (C. com. art. L 223-27, al. 2).

Le commissaire aux comptes d’une SARL ayant opté pour l’audit allégé de ses comptes est en revanche dispensé de convoquer l’assemblée générale en cas de carence du gérant (C. com. art. L 821-57, al. 2 issu de ord. 2023-1142 du 6-12-2023). La demande de convocation ne doit donc pas lui être adressée.
Un ou plusieurs associés représentant au moins le tiers du capital peuvent demander qu’un commissaire aux comptes chargé d’une mission d’audit allégé des comptes soit désigné dans les SARL ne dépassant pas les seuils de nomination obligatoire d’un commissaire aux comptes (C. com. art. L 223-35, dernier al.). La demande doit être motivée. À la lettre du texte, la demande doit être adressée « à la société », qui est tenue de procéder à cette nomination. La désignation d’un commissaire aux comptes relevant de la compétence de l’assemblée générale ordinaire (n° 4290), la demande doit, à notre avis, être adressée au gérant de la SARL qui n’aura d’autre choix que de convoquer une assemblée générale en vue de la nomination du commissaire.

Motifs de la demande de convocation émanant des associés

Le Code de commerce ne précise pas les motifs pour lesquels les associés peuvent demander au gérant ou au commissaire aux comptes chargé d’un audit classique des comptes la convocation d’une assemblée générale et la jurisprudence est rare en la matière. Toutefois, on peut penser qu’une telle demande est justifiée lorsqu’elle tend à des fins conformes à l’intérêt social.

Effets de la demande de convocation émanant des associés

Le gérant ou le commissaire aux comptes chargé d’un audit classique des comptes, saisi par les associés d’une demande de réunion d’une assemblée générale, est tenu de convoquer celle-ci et ne peut pas opter pour un autre mode de consultation (consultation écrite ou constatation du consentement des associés dans un acte). Les dispositions de l’article L 223-27, al. 4 du Code de commerce étant impératives, il en résulte également que la demande des associés ne peut pas porter sur un autre mode de consultation que l’assemblée.

Le Code de commerce ne prévoit aucune sanction spécifique en cas de refus du gérant, ou le cas échéant du commissaire aux comptes chargé d’un audit classique des comptes, de convoquer une assemblée générale à la demande des associés. Ces derniers ne peuvent pas convoquer eux-mêmes l’assemblée ; ils doivent donc s’adresser au président du tribunal pour obtenir la désignation d’un mandataire qui sera chargé d’effectuer cette convocation. Si le refus du gérant porte sur la convocation de l’assemblée annuelle d’approbation des comptes, ils peuvent saisir le président du tribunal afin d’enjoindre au gérant de convoquer cette assemblée ou de désigner un mandataire pour y procéder.

Un gérant ayant refusé de recevoir la mise en demeure d’un associé de convoquer une assemblée appelée à statuer sur sa révocation n’a pas été condamné à verser des dommages-intérêts à l’associé pour maintien abusif dans ses fonctions pendant trois ans car ce dernier ne s’est pas opposé à ce maintien par une demande de désignation en justice d’un mandataire chargé de procéder à cette convocation (Cass. com. 4-4-1995 n° 92-22.020 D, Sté Kis photo industrie c/ R. : RJDA 10/95 n° 1110).
Le refus du gérant peut toutefois constituer une faute de gestion et entraîner la mise en cause de sa responsabilité ou constituer un juste motif de révocation.

Nullités relatives à la convocation dans la SARL

Toute assemblée irrégulièrement convoquée peut être annulée (C. com. art. L 223-27, al. 7).

Une réponse ministérielle précise (Question écrite n° 55206 🙂 « toute assemblée convoquée directement par un associé est irrégulière et peut donc être annulée (art. L. 223-27, alinéa 7 du code de commerce), étant précisé qu’il s’agit d’une nullité facultative dont le prononcé relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges. »


Cette disposition n’a pas vocation à s’appliquer lorsque l’annulation d’une assemblée est sollicitée, non parce que l’assemblée a été irrégulièrement convoquée, mais parce qu’une personne n’ayant pas la qualité d’associé y a participé (Cass. com. 11-10-2023 n° 21-24.646 FS-B : RJDA 1/24 n° 37). Sur l’annulation d’une assemblée à laquelle a participé un non-associé, voir n° 83550.

La nullité prévue par l’article L 223-27, al. 7 du Code de commerce constitue une sanction facultative, les juges saisis de la demande en annulation n’étant pas liés par la constatation d’une telle irrégularité (Cass. com. 5-12-2000 n° 98-13.904 F-P : RJDA 2/01 n° 175 ; CA Paris 5-1-2016 n° 14/21649,). Mais, vient de juger la Cour de cassation, une irrégularité dans la convocation d’un associé n’entraîne la nullité des délibérations qu’à deux conditions : il faut que cette irrégularité ait privé l’associé de son droit d’y prendre part et qu’elle ait été de nature à influer sur le résultat du processus de décision, ces deux conditions étant cumulatives (Cass. com. 29-5-2024 n° 21-21.559 F-B, analysé n° 9115). En conséquence, l’irrégularité n’entraînera pas l’annulation des délibérations si l’intéressé a néanmoins pu participer à l’assemblée ; en cas d’absence de l’associé irrégulièrement convoqué, les juges devront rechercher si cette absence a pu influer sur le processus de décision. Cette décision pourrait relativiser la portée des solutions dégagées par la jurisprudence antérieure examinées ci-dessous.

Une assemblée convoquée par un associé non gérant pour se prononcer sur la révocation du gérant peut ne pas être annulée. CA Paris 6-3-1998 n° 96-83403.

A l’inverse, Convocation de l’assemblée par un associé.La convocation d’une assemblée générale par un associé, sans avoir fait désigner un mandataire de justice pour y procéder, et sa désignation par ladite assemblée en qualité de gérant sont irrégulières ; par suite, ce gérant irrégulièrement nommé n’a pas qualité pour représenter la société en justice. Cass. com. 17-1-2006 n° 04-14.157 F-D, Sté Le Prive c/ D. : Bull. Joly 2006 p. 790 n° 165.

Dépôt de points ou de projets de résolution par les associés de SARL

Peuvent faire inscrire des points ou des projets de résolution à l’ordre du jour d’une assemblée le ou les associés qui détiennent, au jour de la demande d’inscription, au moins 5 % des parts sociales (art. L 223-27, al. 5 et R 223-20-3, al. 1).

La demande doit être adressée à la société, par lettre recommandée AR ou courrier électronique avec accusé de réception, 25 jours au moins avant la date de l’assemblée (art. R 223-20-3, al. 1). Lorsqu’elle porte sur un point, la demande doit être motivée (art. R 223-20-3, al. 2). Lorsqu’elle porte sur un projet de résolution, la demande doit être accompagnée du texte de ce projet, lequel peut être assorti d’un bref exposé des motifs (art. R 223-20-3, al. 3).

Dès lors que les conditions de la demande ont été respectées, l’inscription des points et projets de résolution à l’ordre du jour s’impose au gérant (art. R 223-20-3, al. 4), qui ne peut pas se faire juge de leur opportunité. Notamment, il ne peut pas, à notre avis, refuser d’inscrire à l’ordre du jour un point ou un projet de résolution qui serait sans rapport avec l’objet de l’assemblée car aucune disposition ne lie cette inscription aux questions à débattre. En outre, les associés n’ont pas nécessairement connaissance de l’ordre du jour de l’assemblée à la date où la demande d’inscription est présentée à la société.
Les points ou projets de résolution qu’un associé a fait inscrire à l’ordre du jour d’une assemblée doivent être portés à la connaissance des autres associés (art. L 223-27, al. 5), à notre avis dans les mêmes conditions que les autres documents d’assemblée (voir n° 32400 s.), afin de respecter le principe selon lequel les associés doivent bénéficier d’une information complète et pouvoir voter les projets de résolution en toute connaissance de cause (dans le même sens, Communication Ansa, comité juridique n° 04-046 du 5-5-2004, à propos des SA mais transposable).

Les projets de résolution émanant des associés doivent être soumis au vote de l’assemblée (art. R 223-20-3, al. 4).

Modèle de résolutions

Sources

Mémento Assemblées générales 2025-2026
Mémento Transmission d’entreprise 2025-2026
Mémento Sociétés commerciales 2025

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