Comment contester la force probante d’un acte notarié ?

Aux termes de l’article 1371 du code civil (ancien 1319):

« L’acte authentique fait foi jusqu’à inscription de faux de ce que l’officier public dit avoir personnellement accompli ou constaté.
En cas d’inscription de faux, le juge peut suspendre l’exécution de l’acte. »

Mais, la force probante des mentions d’un acte notarié est variable selon qu’elles portent sur des faits personnellement constatés par le notaire ou sur de simples déclarations des parties.

Synthèse

La force probante d’un acte notarié n’est pas uniforme : elle dépend de la nature des faits qu’il relate. Les mentions constatées personnellement par le notaire — celles qu’il a vues, entendues ou accomplies dans l’exercice de ses fonctions — font foi jusqu’à inscription de faux. En revanche, les déclarations provenant des seules parties, telles qu’un paiement effectué hors la présence du notaire, ne bénéficient pas de cette autorité. Elles ne valent qu’à titre de preuve simple et peuvent être librement contestées par la production d’un écrit, d’un commencement de preuve par écrit, ou, s’il s’agit d’un tiers, par tout moyen. Cette distinction, issue du droit classique et aujourd’hui consacrée par l’article 1371 du Code civil, rappelle que l’authenticité d’un acte ne confère pas la vérité à tout ce qu’il contient.

L’inscription de faux uniquement pour les constations du Notaire

L’acte authentique fait foi jusqu’à inscription de faux des faits que l’officier public y a énoncés comme les ayant accomplis lui-même ou comme s’étant passés en sa présence dans l’exercice de ses fonctions :

  • Pour un paiement à la vue du notaire  (Cass. 1e civ. 26-5-1964 : Bull. civ. I no 274 ; Cass. 1e civ. 4-3-1981 no 80-14.123).

En d’autres termes, ces mentions ne peuvent être contestées que dans le cadre de la procédure d’inscription de faux, régie par les articles 303 s. du Code de procédure civile (Cass. 1e civ. 11-6-2003 no 00-11.931 FP-PB), sauf exception (Cass. 3e civ. 28-3-2024 no 22-17.415 F-D, pour la mention de l’origine de la propriété du bien vendu).

Simple preuve contraire pour ce que le Notaire n’a pas personnellement constaté

Les déclarations faites par les seules parties dans l’acte notarié peuvent néanmoins être contestées sans recourir à la procédure d’inscription de faux, dès lors qu’elles ne portent pas sur des faits personnellement constatés par le notaire, mais sur des éléments dont il ne fait que rapporter l’affirmation des parties.

Les énonciations faites par les parties dans un acte et ne portant pas sur des faits personnellement constatés par l’officier public peuvent faire l’objet de la preuve contraire sans qu’il soit nécessaire de recourir à la procédure d’inscription de faux (Cass. 1e civ. 2-11-2005 no 03-19.622 F-PB  ; Cass. 1e civ. 11-9-2013 no 12-22.335 F-D ; Cass. 1e civ. 15-3-2023 no 22-18.147 FS-B).

S’agissant de la contestation de la mention d’un paiement hors la vue du notaire :

  • par l’une des parties à l’acte, cette dernière doit apporter la preuve contraire par écrit ou commencement de preuve par écrit sauf impossibilité de se procurer un écrit (C. civ. art. 1359 s. ; ex-art. 1341 s. ; Cass. 3e civ. 27-2-2008 no 07-10.222 FS-PB).
  • par un tiers, celui-ci peut apporter la preuve contraire par tous moyens (Cass. 1e civ. 11-3-2009 no 07-20.132 FS-PB).

Exemple : Un acte notarié de vente immobilière précise que l’acheteur a déjà payé le prix en dehors de la comptabilité du notaire et que le vendeur lui en donne quittance. Ce dernier demande néanmoins la résolution de la vente pour défaut de paiement du prix. Une cour d’appel rejette la demande, jugeant que les mentions précitées, signées par les parties, font foi et que, en l’absence d’inscription de faux, le vendeur ne peut pas les combattre en invoquant un aveu judiciaire ou un commencement de preuve par écrit. La Cour de cassation censure cette décision : dans un acte notarié, les énonciations faites par les parties et ne portant pas sur des faits personnellement constatés par l’officier public et ministériel peuvent faire l’objet de la preuve contraire sans qu’il soit nécessaire de recourir à la procédure d’inscription de faux. Cass. 1e civ. 3-9-2025 no 23-19.353 F-D

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