Agent commercial : comment se faire payer l’indemnité compensatrice ?

En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi et il perd ce droit s’il n’a pas notifié au mandant, dans un délai d’un an à compter de la cessation du contrat, qu’il entend faire valoir ses droits (C. com. art. L 134-12).

Délai

L’agent qui ne notifie pas dans l’année de la rupture du contrat sa demande d’indemnité est déchu du droit à réparation (Cass. com. 18-5-2005 no 03-20.820 FS-PB : RJDA 8-9/05 no 965 ; Cass. com. 27-9-2005 no 03-18.579 F-PB : RJDA 12/05 no 1346).

Formalisme de la notification

La notification par laquelle l’agent commercial informe le mandant qu’il réclame une indemnité à la suite de la fin du contrat, qui doit manifester son intention non équivoque de faire valoir ses droits à réparation, n’est soumise à aucun formalisme particulier.

Cass. com. 20-3-2024 no 22-22.799 F-D

La notification n’est soumise à aucun formalisme particulier (Cass. com. 15-3-2017 no 15-20.115 F-D : RJDA 7/17 no 449 ; Cass. com. 23-3-2022 no 20-11.701 F-D : RJDA 11/22 no 626) et il avait déjà été jugé qu’elle pouvait être adressée par l’agent commercial à un représentant de son mandant (Cass. com. 21-10-2014 no 13-18.370 F-PB : Bull. civ. IV no 151).

L’intention de l’agent commercial de percevoir son indemnité de fin de contrat est appréciée souverainement par les juges du fond. Il a été admis que vaut notification une lettre mettant en demeure le mandant de respecter ses obligations contractuelles, faute de quoi, à l’expiration du délai imparti, le contrat sera rompu, « sans préjudice des droits à indemnité de l’agent » (Cass. com. 11-3-2008 no 07- 10.590 F-PB : RJDA 6/08 no 638) ou encore l’acte de saisine de la commission de conciliation d’une juridiction italienne du travail dans lequel était demandée la réparation du préjudice résultant de la « résiliation irrégulière du rapport d’agence » et des « préjudices consécutifs » (Cass. com. 23-3-2022 no 20-11.701).

En revanche, la demande présentée par un agent commercial devant le conseil des prud’hommes et fondée sur l’existence d’un contrat de travail ne vaut pas notification au mandant de l’intention de réclamer une indemnisation au titre de la cessation d’un contrat d’agent commercial (Cass. com. 29-9-2009 no 08-17.611 F-PB : RJDA 1/10 no 22).

Comment evaluer et fixer le montant de l’indemnité ?

L’article L 134-12 du Code de commerce ne précise pas les modalités de calcul de l’indemnité destinée à compenser le préjudice subi par l’agent commercial du fait de la rupture du contrat, pas plus qu’il ne distingue selon que le contrat rompu est ou non à durée déterminée.

Le préjudice à réparer consiste en la perte par l’agent pour l’avenir des revenus tirés de l’exploitation de la clientèle commune (Cass. com. 23-4-2003 no 01-15.639 FS-PB : RJDA 10/03 no 940 ; Cass. com. 16-11-2022 no 21-10.126 FS-B). Si le contrat rompu était à durée déterminée, est indemnisée la perte des commissions jusqu’au terme du contrat, tel qu’initialement convenu par les parties (Cass. com. 23-4-2003 précité). Si le contrat était à durée indéterminée, les juges évaluent l’indemnité compensatrice en fonction des usages, de la durée des relations et du montant des commissions perçues durant le contrat (Cass. com. 18-5-2010 no 09-15.023 F-D ; CA Versailles 7-1-2010 no 08/7984 : RJDA 5/10 no 521), ce qui peut conduire les juges à écarter toute indemnité si le contrat n’a jamais donné lieu au paiement de commissions (Cass. com. 4-11-2014 no 13-18.024 F-PB : Bull. civ. IV no 155, accordant toutefois des dommages-intérêts à l’agent dont l’activité avait été entravée par le mandant).

La faute grave pour priver l’agent commercial de son indemnité

l’agent n’a pas droit à l’indemnité compensatrice lorsque la résiliation résulte d’une faute grave qu’il a commise ou lorsqu’il a pris l’initiative de la rupture (sauf exceptions) ou lorsqu’il cède le contrat à un tiers (C. com. art. L 134-13).

La réduction de l’indemnité

L’indemnité ne saurait être réduite au motif que l’agent a, postérieurement à la rupture du contrat, conclu un nouveau contrat d’agence commerciale avec un autre mandant pour la prospection de tout ou partie de la même clientèle et ainsi perçu de nouvelles commissions (Cass. com. 16-11-2022 précité). Le principe vaut que le contrat rompu ait été ou non à durée indéterminée.

Le mandant qui a rompu le contrat d’agence commerciale ne peut pas réduire l’indemnité compensatrice due à l’agent au motif que ce dernier a retrouvé rapidement un nouveau mandant. Cass. com. 29-1-2025 no 23-21.527 F-B, X c/ Sté Cabinet Habilis.

Après la rupture d’un contrat d’agence commerciale par le mandant, une cour d’appel limite le montant de l’indemnité due par le mandant à l’agent aux motifs que ce dernier n’était pas lié par une clause de non-concurrence, qu’il avait retrouvé un emploi dans la même branche presque immédiatement et qu’il ne produisait aucun élément sur les commissions qu’il avait perçues depuis la rupture du contrat.

Cette décision est censurée par la Cour de cassation. En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi (C. com. art. L 134-12, al. 1). Il en résulte que la cessation du contrat d’agence commerciale donne droit à réparation du préjudice résultant, pour l’agent commercial, de la perte pour l’avenir des revenus tirés de l’exploitation de la clientèle commune. Il n’y a donc pas lieu, aux fins d’évaluer ce préjudice, de tenir compte des circonstances postérieures à la cessation du contrat telles que la conclusion par l’agent d’un nouveau contrat en vue de prospecter la même clientèle pour un autre mandant.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *